Après avoir émis une diatribe contre Nicolas Sarkozy et ça il sait le faire , Pierre Moscovici a nuancé ses propos en disant « dire aujourd’hui que Nicolas Sarkozy a déjà perdu les élections de 2012, ce serait imprudent. Nicolas Sarkozy est une bête politique, il peut rebondir. Mais les ressources politiques dont il dispose par lui-même ou dans son camp sont aujourd’hui extrêmement faibles« . Alors comment Nicolas Sarkozy peut-il rebondir, pour reprendre le même terme de Moscovici ? Il y deux écoles.
Le première est composée de ceux qui pensent que Sarkozy peut rebondir grâce à la situation internationale qui peut le servir. Pour étayer leur thèse, ils citent la période récente qui montre que les moments où le président de République a su rebondir dans l’opinion sont des moments où il a parlé de la France et de ses valeurs au niveau international et où à certains égards il a pu contester aux américains une certaine forme de suprématie. Les défenseurs de cette thèse prennent deux exemple :le cas de la Georgie lors de la présidence européenne par la France et le sommet du G20 où le peuple de droite qui avait été déstabilisé s’est ressoudé autour de Nicolas Sarkosy et ceci indépendamment de l’efficacité de son action.
La seconde école ne croit pas particulièrement à la thématique internationale. Elle est composée de personnes qui pensent que le point central c’est l’attitude et le comportement du président de la République ainsi que les résultats obtenus en politique intérieure. Pour eux, le chef de l’État sera jugé sur ses résultats. A un moment donné et tout au moins avant la fin 2011, il devra démontrer que toutes les réformes qu’il a éngagées produisent des résultats. Il me paraît indéniable et sans prendre partie sur la qualité des réformes que la crise qui dure depuis l’automne 2008 lui complique assez sérieusement la tâche. Il ne s’agit pas pour moi de le dédouanner car on sait que les Français ne tiennent aucun compte de cette crise et son opposition qu’elle vienne de la gauche ou de son propre camp fait tout pour que les citoyens que nous sommes fassent abstraction de cette crise et ne jugent que sur le concret c’est à dire sur le quotidien des Français. Le paradoxe de cette opposition de droite et de gauche est qu’elle ne parle que de collectif mais qu’elle joue insidieusement sur l’individualisme de la société qui fait que chacun juge en fonction de sa situation personnelle. Ceux là se moquent de l’environnement international même s’ils en ont conscience. La seule question que la plupart d’entre nous va se poser est individuelle » est ce que depuis qu’il a été mis en place , le pouvoir a pris des mesures pour que ma situation personnelle s’améliore« . C’est la seule question que l’on va se poser. C’est cette indivualisme par exemple qui rend,par exemple, les promesses sur le pouvoir d’achat difficiles à tenir parce que chacun peut avoir le sentiment qu’en regard de son implication, de son mérite et des efforts entrepris, le pouvoir d’achat ou la rémunération qu’il va avoir en retour n’est pas suffisamment importante d’où la création d’une part d’insatisfaction et ceci indépendamment de la réalité.
Nous vivons une période particulièrement complexe qui est à mon sens indiscutable et qu’on ne peut pas nier, c’est que la situation économique et notamment en Europe ne va pas se redressser demain d’un coup de baguette magique. L’Europe est dans une situation difficile avec une croissance molle alors que l’environnement mondial est au contraire en forte, voire très forte croisance et c’est particulièrement le cas en Chine, en Inde, aux Etats-Unis, au Brésil. Il faut être de mauvaise foi pour être surpris car nous le savions. Nous avons en Europe et notamment en France des systèmes qui font que l’on ressent moins la crise, mais en contre partie nous éprouvons plus de difficulté pour en sortir. En France tout le monde a entendu l’expression » d’amortisseurs sociaux« . Je l’avais d’ailleurs développé ici au début de la crise. Le chef de l’Etat a fait un pari qui est celui de libérer, grâce aux réformes, les forces de l’économie afin d’éviter cette lenteur dans la reprise. On n’en voit pas encore les effets ce qui amène les Français à se poser la question de son efficacité. On peut espérer que d’ici un an et demi ces effets se feront sentir.
Les études sur les résultats des élections régionales sont terminées et on connaît aujourd’hui de façon assez précise les catégories de population traditionnellement de droite qui ne sont pas déplacées. Il s’agit en autres des médecins, des agriculteurs, des magistrats. Les deux pemières catégories se sont abstenues, nous disent les études, parce qu’elles ne voient pas les résultats des engagements pris par le candidat Sarkozy. En ce qui concerne les magistrats, ils auront au moins obtenu le report voire la fin de la réforme de la procédure pénale, et pour d’autres encore la fin de la taxe carbone et pour les médecins la consultation à 23 euros à partir du 1er janvier prochain.
Il y a deux réformes qui ont été menées à terme, ce sont la fiscalité avec la loi TEPA et la réforme des universités qui a été une réforme d’une grande importance mais dans la situation actuelle, elle est passée aux oubliettes. Pour les autres on est selon l’expression « au milieu du gué« . Pour être tout à fait dans l’actualité, il me semble que Nicolas Sarkozy est entrain de réaliser un chef d’oeuvre politique en se prononçant pour une loi interdissant le port de la burga sur lequel j’avais fait un billet. En effet si on en croit le constitutionnaliste Guy Carcassonne qui à la question sur une censure éventuelle par le Conseil constitutionel répond je le cite : « Ça dépend de la manière dont elle est rédigée. S’il s’agit d’interdire exclusivement la burqa, ça peut poser des problèmes de constitutionnalité car on interdirait un signe extérieur de religion, ce qui n’est pas nécessairement conforme au principe de liberté. Mais s’il s’agit d’interdire tout ce qui dissimule intégralement le visage — en dehors des cas où c’est justifié par l’exercice professionnel, comme les gendarmes du GIGN, ou les périodes de carnaval —, ça ne pose pas de problème. Ça devient une législation d’ordre public« . Le vote ou pas de la loi va mettre les députés face à leurs responsabilités et on va alors voir qui va voter la loi et qui ne va pas la voter. Cela va créer du désordre à gauche. Si les députés décident d’aller devant le CC et si celui-ci décide de censurer la loi, le chef de l’Etat peut alors faire appel aux Français. On imagine alors l’embarras du Front National obligé d’appeler à voter « oui » à une proposition de Nicolas Sarkozy et celui du PS où régnerait la cacophonie. Dans tous les cas, la gauche va se diviser et selon le cas, peut être deux fois. En allant contre l’avis du Conseil d’Etat Nicolas Sarkozy sait parfaitement ce qu’il fait et pourquoi il le fait. Là dessus on a pas le moindre doute à avoir. Je me souviens de ceux qui il y a peu écrivaient qu’en ne suivant pas l’avis du Conseil d’État Nicolas Sarkozy allait droit au casse pipe, on s’aperçoit que tous ces donneurs de leçons sont loin d’être aussi fins politiques. Ce sont pour la plupart les mêmes que ceux qui avaient viré François Fillon et fait des mises en place après les élections régionales. Sarkozy est entrain de donner une leçon de real politique. Les propos de Pierre Moscovici cités au début de ce billet prennent tout leur sens.
Je fais partie de ceux qui croient plus au comportement et au style du président de la République qu’à la thématique internationale même si à la fin de l’année le rôle que la France est appelée à jouer devrait permettre on peut l’espérer un rebond du chef de l’Etat dans l’opinion. En ce qui concerne le style il faut arrêter ces stupidités dont tout le monde se fout et que sont les rumeurs et on ne sait quels complots. Je fais partie de ceux qui pensent que le principal adversaire de Nicolas Sarkozy c’est lui même. Son attitude et son style lors de la campagne présidentielle ont été ses principaux atouts parce qu’il était candidat. Aujourd’hui qu’il est président ce n’est plus le cas, au contraire son attitude et son style jouent contre lui. Il n’a pas su faire la différence entre le candidat président et le Président élu et c’est ce qui explique ce désamour. Il faut qu’il habite sa fonction. Pour habiter cette fonction il faut qu’il cesse de faire le travail qui reléve du Premier ministre voire des ministres. Ce n’est pas à lui de recevoir les conducteurs d’autobus, il dévalue la fonction présidentielle. Ce travail appartient au ministre de l’intérieur, à la rigueur au Premier ministre et encore, mais en aucun cas au président de la République.
En 2011, le G20 aura lieu en France. Ce peut être l’occasion pour Nicolas Sarkozy de présidentialiser sa fonction et donc de rebondir un peu, ensuite pour peu que la situation économique s’améliore au cours de l’année, alors tout reste possible.
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