Penser par soi-même : un défi ?

Quand on est jeune on est imprégné des idées de ses parents, a l’adolescence on répète souvent ce que l’on entend d’un côté ou de l’autre et parfois on se contredit, Adulte si on fait de la politique on vous remet des argumentaires et on devient alors la voix de son maître. Il y a quelque mois j’avais fait deux articles. Le premier était qu’est ce qu’un intellectuel ? et le second qu’est ce que la culture ?

Je crois que l’on peut voir l’intérêt d’un blog sous deux angles. Le premier peut être de faire des sujets sur ce que pensent d’autres personnes. C’est ce que je fais lorsque je synthétise un livre sous forme d’un article, je résume alors la pensée d’un autre. Le second c’est de traiter des sujets en disant ce que l’on pense. Mais est ce que l’on pense vraiment ? N’est-on pas influencer par le matraquage médiatique ? Aujourd’hui je vais essayer de traiter un sujet que j’avais abordé il y a quelques mois, mais je vais essayer de le faire de façon plus élaborée. Alors peut-on penser par soi même ? Je me lance et demande votre indulgence.

Si je devais faire une réponse générale, j’aurais tendance à répondre par l’affirmative. Oui, on peut penser par soi même, même si on n’y arrive jamais totalement. Mais on ne pense pas spontanément par soi-même, c’est à apprendre et à renouveler sans cesse.

En effet on ne pense pas d’abord par soi-même. Descartes souligne que nous avons été enfants avant que d’être hommes. Nos jugements ne peuvent donc être ni si purs ni si solides qu’ils auraient été si nous avions eu l’usage entier de notre raison dès le point de notre naissance et que nous n’eussions jamais été conduits que par elle (discours de la méthode II). Nos premiers jugements sont des préjugés. Il ne faut donc pas tenir pour vrais des jugements dont notre pensée n’a pas examiné la valeur de vérité. Penser par soi-même est, en ce sens philosophiquement nécessaire.

Il ne faut pas confondre la reconnaissance de l’existence de la pensée de la conscience, l’affirmation de cette existence en l’homme et le contenu de cette pensée, le « dubito cogito ergo sum » de Descartes n’est que cette affirmation de la possibilité de la pensée de l’homme. Il en est de même pour le « j’existe parce que je pense » de Sartre.

Ce n’est pas parce que j’ai la possibilité de la pensée que je pense par moi même. Il faut avoir, pour cela, conscience qu’il faut se libérer des préjugés, de tout ce qui a été reçu dans l’éducation (quelque chose de passif), il faut prendre du recul, connaître, comparer, sortir de soi-même pour mieux voir et ensuite pouvoir pendre la décision de penser ce qui nous paraît vrai en essayant d’être objectif. Il faut faire cet exercice intellectuel en sachant également que nous avons un inconscient qui peut nous déterminer. Il faut être capable de se questionner, de sortir des opinions, des images (médias) qui ont une très grande force; il faut devenir adulte, sortir de l’enfance et de l’adolescence pour choisir et c’est là que nous devenons libres.

En effet, il faut surtout remarquer qu’une pensée véritablement originale est d’abord une pensée, c’est à dire une idée, une construction de représentation qui sont intelligibles, que l’on peut comprendre; l’opinion, au contraire, ou le préjugé, ne sont ni des pensées originales, ni même tout à fait des pensées, dans la mesure où la réflexion manifeste leurs contradictions, leur insuffisante intelligibilité. C’est le sens de l’ironie socratique : elle rend éclatante l’absence de pensée dans les opinions habituelles.

Dés lors, si je comprends une pensée, par exemple celle de Descartes, l’ordre des raisons qu’il institue, je suis en présence de la pensée d’un homme qui a pensé par lui-même; mais comme sa pensée est une vraie pensée, ce faisant, j’entre moi même dans la sphère e la pensée,ou, si l’on veut, je pense enfin par moi-même.

Penser par soi-même, c’est être capable de dire « non » non pas à la manière d’un enfant capricieux. Il faut être capable d’étonnement, de doute. Il faut être capable de sortir de l’illusion. Avant de la reconnaître, il faut être capable d’avouer son ignorance;

Alain dit « penser c’est dire « non«  », « penser c’est s’opposer à l’autre, c’est s’opposer à l’engluement dans l’existant« . Penser, c’est sortir du « on« , on dit ceci ou cela. Le « on » est inauthentique. Penser c’est toujours aussi être prêt à adhérer à la vérité, c’est le sens du « connais toi toi même  » de Socrate qui n’est nullement de l’introspection, mais une atteinte difficile de la vérité qui est en nous et qui n’est pas du tout de l’individualisme car si la vérité existe, elle est une et chacun peut la retrouver par lui même en lui même et c’est la même pour tous. Mais, ce n’est pas pour autant la pensée unique qui est un ensemble doctrinal imposé et non pas choisi; penser par soi-même permet de s’affirmer, de créer mais cela est difficile.

De toute façon, on restera toujours tributaire des modes de fonctionnement de notre raison, de notre imagination reçus dans l’éducation et sans arrêt intervient tout ce que nous recevons de l’extérieur, de notre environnement. Pour penser par nous mêmes, il ne faut pas se laisser envahir passivement par tout cela, il faut trier, choisir, mais il ne faut pas non plus tout rejeter en bloc, ce qui nous éloigne du réel et risquerait de nous faire passer dans l’illusion qui peut mener à la folie.

L’expression « penser par soi-même » est ambiguë. Elle peut signifier l’accès à la réflexion philosophique, qui est un refus des idées reçues, fantômes de pensées; mais accéder à cette réflexion, c’est tout simplement penser : le penser « par soi-même » fait pléonasme. Réfléchir sur ce plan, c’est aussi prendre conscience, avec Heidegger, que ce qui donne le plus à penser, c’est que nous ne pensons pas encore (cf que veut dire « penser » « , in essais et conférences.

Citations

« Tout homme qui est un vrai homme doit apprendre à rester seul au milieu de tous, à penser seul pour tous et au besoin contre tous  » Romain Rolland

« Gardons-nous de suivre la pensée d’un auteur…d’ailleurs, qu’en sait-il de sa pensée ? H Michaux