Lundi matin au réveil nous avons tous entendu ce chiffre de 750 milliards. Pour nous c’est un ordre de grandeur qui nous dépasse et on peut se poser plusieurs questions. D’où sortent-ils ? A quoi vont-ils servir et pour qui ?
Il faut tout d’abord avoir en tête, même si cela ne change rien que ce plan n’a pas été voté, il a été adopté dans l’urgence lors d’une réunion dite de crise qui avait divers objectifs dont les mots clés étaient « sauver » et « calmer. » Il s’agissait tout d’abord de sauver l’euro ce qui était primordial, le système financier qui était au bord du crash et les banques qui risquaient à nouveau de souffrir (les banques françaises sont assez engagées en Grèce). Ensuite il fallait calmer les inquiétudes des marchés financiers et celles des Etats-Unis. En effet on a appris que le président des États-Unis Barack Obama a téléphoné à Nicolas Sarkozy et à Angéla Merkel pour leur demander de faire en sorte que l’Europe se mobilise pour apporter une solution à la crise et à la baisse de l’euro.
Ceci dit, nous ne sommes pas le 25 décembre et ce n’est pas le Père Noël qui a apporté et mis devant la cheminée ces 750 milliards. Cette somme a trois origines différentes:
Fonds de stabilisation
Il y a tout d’abord ce que l’on appelle un fonds de stabilisation doté de 60 milliards d’euros. Ça, c’est de l’argent directement mobilisable. Pour ce faire, l’Europe a utilisé un dispositif qu’elle a déjà mis en oeuvre pour sauver les pays qui sont hors de la zone euro et notamment la Hongrie. Ils vont servir à apporter une aide financière à très court terme si un pays venait à avoir un problème de financement, par exemple s’il n’arrivait pas à boucler une émission d’emprunt auprès des marchés, à ce moment là l’Europe pourrait utiliser ce fond qui est une sorte de trésor européen.
Fonds de garantie
Ensuite il y a un second fonds qui lui, est très différent. Comme on l’a fait pour les banques en 2008 c’est une forme de garantie qu’apportent les états. Son montant est de 440 milliards qui vont servir à apporter via l’Europe une sorte de garantie pour permettre aux états d’emprunter moins cher que sur les marchés financiers notamment auprés des banques mais aussi auprès des investisseurs de façon générale. C’est donc une forme de garantie et c’est une révolution parce que l’Europe va pouvoir s’endetter sur les marchés financiers ce qui jusqu’à présent n’avait pas été accepté. Ce fonds d’assistance est garanti par les abondements des états membres.
Fonds apporter par le FMI
Le FMI a décider de soutenir l’Europe par un apport de 250 milliards. Il a voulu ainsi apporter la moitié du plan en soutien à ce plan de garantie.
Finalement cela fait donc un total de 750 milliards, somme colossale mais qui ne servira pas forcément. Elle a surtout pour objectif de montrer une mobiisation forte afin d’éviter que les marchés financiers continuent à mettre une forte pression.
Pour autant, le malade n’est pas guéri, même si les places boursières ont réagi de façon très favorable et même si l’euro s’est redressé. Nous n’entrons donc pas dans une période de guérison mais dans une période de rémission. A priori, on peut penser que le caractère historique de ce qui s’est passé dans la nuit de dimanche à lundi devrait permettre de sauver l’Europe.
Changement de position à la BCE
Il y a une mesure qui a été prise et qui pour le moins n’est pas passée inaperçue. En effet la BCE a revu sa position. elle va maintenant acheter des bons du trésor, c’est à dire de la dette, des pays en difficulté. Elle va accepter de prendre en garantie des dettes publiques et privées et ça, c’est exactement le scénario américain ou anglais qui avaient accepté de monnétiser les dettes pour préserver l’économie, la liquidité des marchés et pour protéger la reprise. Comme tout a une contre partie, il va falloir en échange mettre en oeuvre des plans de rigueur afin de remettre les déficits à des niveaux beaucoup plus sérieux en Europe.
Eviter les mouvements brusques
En fait, et que ce soit en France ou ailleurs, il n’y a plus de politique alternative même si certains laissent à penser le contraire. Il faut réduire les déficits parce que si nous vivons cette période de crise c’est tout simplement parce qu’il y a un excés de dettes. Aux États-Unis il s’agit d’un excès de dettes privées, aujourd’hui et après le soutien des états aux banques c’est un excès de dettes publiques.
La crise est également, et nous le savons, économique et il nous faut en sortir. Pour cela il faut conjuguer deux choses. Il faut à la fois réduire les déficits de façon sérieuse et crédible mais ne pas le faire trop brutalement car on remettrait alors en cause la reprise économique et c’est là, toute la contradiction qu’il faut gérer.
Le pacte de stabilité
Si on a fait la réforme du pacte de stabilité c’est pour qu’il y ait désormais en Europe un dispositif de surveillance des budgets et que ce dispositif soit sérieux. Il faut qu’il soit capable de decouvrir les tricheurs, il faut qu’il permette de ramener les déficits et la dette à des niveaux plus raisonnables mais il est évident que tout cela cela va prendre plusieurs années.
Tout ça, ce sont des faits. Et que peut-on en penser ? Cette réflexion n’engage bien entendu que moi mais ce qui a été décidé dans la nuit de dimanche à lundi me paraît globalement positif. Au moins l’Europe vient de montrer qu’elle est capable de se mettre d’accord. Puisque nous sommes en période de remission il faut consolider l’euro. Je sais et je l’ai lu que certains proposent deux euros. Ce n’est pas ce que je pense. Pour moi, il ne s’agit en aucun cas de devoir le diviser mais au contraire de le consolider.
Vous avez dit transgressions ?
On peut lire ça et là que l’on a transgressé les textes. Ceux qui disent ça s’appuient sur deux faits. Le premier est que l’on va financer par l’emprunt des dépenses communautaires ce qui jusqu’alors était interdit et le second c’est le financement par la BCE, en lieu et place des marchés, des dettes souveraines à taux réduits pour que les états puissent s’affranchir de la prime de risque exigée par les marchés pour financer leurs déficits. Alors est ce une transgression ? Il me paraît évident que non car une transgression aurait été de s’affranchir des textes. Or, on a simplement fait quelque chose qui n’est pas prévu et faire des choses qui ne sont pas dans les textes ce n’est pas les transgresser puisque par définition elles n’existent pas. Il faudra simplement par la suite adapter ces textes.
Une Europe pragmatique
Finalement ce que d’aucun nomme transgression n’est plus ni moins que du pragmatisme. C’est de cela que l’Europe a fait preuve parce qu’elle a fait un paquet qui n’était pas prévu par les traités de Maastrich et de Lisbonne et ce paquet il est compatible avec les traités et ce n’est surtout pas le moment d’ouvrir un débat constitutionnel ou institutionnel. Je l’ai écrit dans un précédent billet, comme beaucoup de choses, l’Europe se construit dans la crise et il sera temps dans quelques temps d’apporter des améliorations dans la gouvernance économique et politique de l’Europe et de la zone euro. En période de crise ce qui n’était pas possible la veille, le devient le lendemain et c’est normal. Pour l’instant il y a bien d’autres choses à régler. Lé débat constitutionnel n’est pas d’actualité.
Et maintenant ?
Il va falloir maintenant s’attaquer à l’harmonisation des politiques économiques, de la fiscalité et des lois sociales car tant que chaque pays agira en solo et fera son propre plan de relance, sa propre politique fiscale cela attisera les marchés. En effet les marchés et les investisseurs se nourissent avec la fiscalité, avec les lois sociales. Il ne me paraît difficile d’ avoir à la foi une monnaie unique et des politiques économiques divergentes.
Finalement en dehors de l’aspect financier ce qu’il y a d’extrêmement positif dans ce qui s’est passé cette nuit de dimanche à lundi c’est l’affirmation de la solidarité européenne mais c’est aussi dans la démarche une sorte de fédéralisme dans la gestion de la crise financière.
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