J’ai reçu un courrier d’une lectrice dont le mari me dit-elle connaît bien l’histoire des Hauts de Seine et qui m’écrit ces deux lignes je cite sans changer un mot « Je voudrais vous rappeler que Sarkozy a initié sa vie politique sur une trahison dont Pasqua, hospitalisé, a été la victime. C’est ainsi qu’il est devenu maire de Neuilly…et il n’a pas changé. »
Sauf d’erreur de ma part, je traduis ces deux lignes par : Nicolas Sarkozy a commencé sa carrière politique sur une trahison et il n’a pas changé. En disant « il n’a pas changé » cette lectrice fait peut être allusion au fait que Sarkozy aurait trahi Jacques Chirac lors des élections présidentielles de 1995. Peut être aussi que bon nombre de personne pensent comme cette dame pace que ce sont les seules information qu’on leur a données. En fait c’est tout de même un peu plus compliqué et les deux lignes invoquées par cette lectrice pour cataloguer Nicolas Sarkozy de traître sont un peu réductrices. Tout le monde sait ici que je suis plus chiraquien que sarkozyste mais ce n’est pas pour autant que je doive travestir des faits pour justifier mes positions. Dans la réalité Nicolas Sarkozy n’a pas trahi Jacques Chirac et en ce qui concerne Charles Pasqua, celui-ci reconnaîtra plus tard que Nicolas Sarkozy n’a fait que profiter de son manque de motivation et on ne peut donc pas dire qu’il lui en ai particulièrement voulu, la suite va le démontrer, même si dans son livre « ce que je sais » Charles Pasqua écrit qu’il considére la prise de la mairie de Neuilly par Nicolas Sarkozy comme une trahison.
Sur la mairie de Neuilly
Lorsque ce 14 avril 1983, le maire de Neuilly Achille Perettti est mort d’un infarctus au cours d’une réception, Charles Pasqua était lui hospitalisé et en attente d’être opéré pour une hernie. Nicolas Sarkozy en compagnie de Patrick Balkany qui venait d’être élu maire de Levallois un mois auparavant se rend au chevet de Pasqua qui a été son témoin en 1982 lors de son premier mariage avec Marie-Dominique Culioli. Les deux hommes le font sortir de la clinique et le raméne chez lui. Cette anecdote sera racontée et confirmé par Charles Pasqua lui même qui dit alors je le cite « c’est tout juste s’ils ne m’ont pas habillé« . Pasqua a alors demandé à Sarkozy et Balkany de s’occuper du pointage des conseillers municipaux n’étant pas particulièrement motivé par cette élection. C’est alors que Sarkozy s’est effectivement occupé de l’affaire mais par pour Pasqua, mais pour lui même. En clair devant le manque de motivation de Pasqua il a fait preuve d’opportunisme et de culot, ce que peu auraient effectivement oser. A l’époque Jacques Chirac savait ce qui se tramait mais il n’a rien fait pour sauver Pasqua. Plus tard Charles Pasqua tiendra ses propos » dans cette affaire Chirac n’avait pas à me soutenir. L’un souhaitait bec et ongles ce poste, l’autre était moins motivé« . Trois ans plus tard, nous sommes au temps de la cohabitation entre Mitterrand et Chirac puisque la gauche vient de perdre les élections législatives. Charles Pasqua est nommé ministre de l’intérieur et il fera de Nicolas Sarkozy son chargé de mission. En 2004, c’est Pasqua lui même qui passera la main du conseil général des Hauts-de-Seine à Sarkozy.
Sur le soutien à Edouard Balladur
Lors de cette affaire s’il y a quelqu’un qui n’a pas trahi et qui a été transparent c’est bien Nicolas Sarkozy. Il me semble que trahir c’est faire croire à quelqu’un que l’on est à ses côtés pour mieux le faire échouer. Ce n’est pas absolument pas le cas. Dés novembre 1993, Sarkozy est allé voir Chirac pour lui part faire de son choix qui était celui d’ Edouard Balladur et ce choix ne pouvait pas être qualifié d’opportunisme car en novembre 1993 entre Chirac et Balladur, les jeux étaient loin d’être faits et il était impossible de dire qui sortirait vainqueur de ce duel. Les chiraquiens, même ceux qui sont restés fidéles à Jacques Chirac, et j’en étais, ont reconnu que Nicolas Sarkozy avait été franc contrairement à d’autres qui s’étaient conduits comme des « faux-cul » et qui attendaient que les sondages se précisent pour prendre position. Lors de la période estivale de 2004, les deux hommes , Chirac et Sarkozy, en ont reparlé devant d’autres personnalités de l’ex RPR et des noms ont été cités parmi ceux qui ont rejoint Edouard Balladur sans en avertir qui que ce soit et ce en fonction des sondages alors favorables à Balladur. Je considère que de dire à d’anciens partenaires qu’on les quitte pour aller voir ailleurs ce n’est pas de la traitrise, il faut même parfois beaucoup de courage. La traitrise c’est se faire élire avec l’appui d’un parti politique puis le quitter sans remettre son mandat en jeu. Dire à quelqu’un que l’on n’est plus d’accord c’est au contraire de la franchise, choisir un programme électoral ou un homme plutôt qu’un autre c’est le droit de chacun. Le tout c’est d’être honnête.
J’ai développé dans un document sur Jacques Chirac, les raisons qui l’ont fait préférer Giscard d’Estaing à Chaban Delmas en 1974. Je n’ai pas à l’époque du tout suivi Chirac puisque au premier tour j’ai voté Chaban avant de voter blanc au second entre Mitterrand et Giscard. Néanmoins je n’ai jamais considéré que Chirac avait trahi son camp et j’ai compris le raisonnement intellectuel qui l’a amené à sa décision. En ce qui me concerne je ne pouvais pas suivre et voter Giscard, c’était trop me demander. J’ai respecté le choix qui fut celui de Jacques Chirac sans le considérer comme un traitre.
Quand on n’est plus d’accord avec quelqu’un ou que l’on sent que l’on a plus d’affinité pour un ou une autre personne, on s’explique alors entre « quatre yeux« . Je ne vois pas où est la traitrise. On a tout de même le droit d’évoluer ou de changer d’opinion. La traitrise serait de ne pas le dire et d’être à ce moment là déloyal.
Dans la vie de tous les jours, les couples qui se déchirent sont légions. La politique ne fait pas exception.
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