Les relations franco-allemandes. 1ére partie

Au moment où la France et l’Allemagne effectuent un rapprochement important avec la prévision de l’envoi d’un bataillon allemand en France il me paraît intéressant de faire le point sur l’histoire des relations entre nos deux pays depuis la fin de la guerre. Je vous propose un résumé de cette histoire en trois parties.

Après la guerre le général de Gaulle est convaincu que la République Fédérale Allemande doit jouer un rôle essentiel au sein de la communauté économique. Il entend agir pour que la France tisse avec l’Allemagne un réseau de liens préférentiels qui, peu à peu, amèneront les deux peuples à se comprendre et à s’apprécier, comme leur instinct les y pousse dès lors qu’ils n’emploient plus leurs forces vives à se combattre.

Par une frappante rencontre, au moment où il reprend les rênes à Paris, il advient qu’à la tête du gouvernement de Bonn se trouve depuis longtemps déjà et pour assez longtemps encore Konrad Adenauer, c’est à dire, de tous les Allemands, le plus capable et le plus désireux d’engager son pays sur la route et aux côtés de la France. Le Chancelier qui, à force de persévérance est parvenu jusqu’à présent à maintenir la République Fédérale en équilibre et en progrès, manœuvre pour que ni la menace de l’Est ni la protection de l’ Ouest ne mettent en cause l’édifice fragile d’un État bâti dans les décombres et discerne de quel prix serait, au-dedans et au-dehors, la caution déterminée de la nouvelle République Française.

Dés qu’il comprend que le retour du Général est autre chose qu’un épisode, le Chancelier demande à le voir. Les deux hommes vont se rencontrer à Colombey-les-deux-églises les 14 et 15 septembre 1958. les voici donc en tête à tête. Tout de suite Adenauer pose la question de confiance  » Je viens vers vous parce que je vous considère comme quelqu’un qui est en mesure d’orienter le cours des événements. Votre personnalité, ce que vous avez déjà fait au service de votre pays, enfin les conditions dans lesquelles vous avez repris le pouvoir, vous en donnent les moyens. Or, nos deux peuplent se trouvent, l’un par rapport à l’autre, actuellement et pour la première fois, dans une situation qui leur permet de placer leurs relations sur des bases entièrement nouvelles, celles d’une cordiale coopération« . Ensuite le Chancelier développe sa pensée sur ses objectifs.

De Gaulle répond que si les deux hommes se trouvent ensemble à Colombey c’est parce qu’il croit le moment venu pour la France de faire, vis-vis de l’Allemagne, l’essai d’une politique nouvelle. La France , après les terribles épreuves déchaînées contre elle, en 1870, en 1914, en 1939, par l’ambition germanique, voit en effet l’Allemagne vaincue, démantelée et réduite à une pénible condition internationale, ce qui change du tout au tout les conditions de leurs rapports en comparaison du passé. Sans doute le peuple français ne peut-il perdre le souvenir de ce qu’il a souffert jadis du fait de son voisin d’outre Rhin et négliger les précautions qui s’imposent pour l’avenir. Le Général, d’ailleurs, avant la fin des hostilités, envisage que, de notre fait, ces précautions devraient être prises matériellement et sur le terrain.

Mais, étant donné, d’une part la dimension des événements accomplis depuis lors et la situation qui en résulte pour l’Allemagne, d’autre part la tournure des choses et l’orientation des esprits en République Fédérale grâce à l’action menée par le gouvernement de Konrad adenauer, enfin l’intérêt primordial que présenterait l’union de l’Europe , union qui exige avant tout la coopération de Paris et de Bonn, de Gaulle estime qu’il faut tenter de renverser le cours de l’histoire, de réconcilier les deux peuples et d’associer leurs efforts et leurs capacités.

Ceci dit, Adenauer et de Gaulle en viennent à considérer comment y parvenir dans la pratique. Ils s’accordent sur le principe qu’il y a lieu, non point de confondre les politiques respectives des deux pays, comme avaient prétendu le faire les théoriciens de la C.E.C.A., de l’Euratom, de la communauté européenne de défense, mais au contraire de reconnaître que les situations sont très différentes et de bâtir sur cette réalité. Le Chancelier demande à la France de l’aider à retrouver au-dehors la considération et la confiance qui lui rendront son rang international, de contribuer à sa sécurité en face du camp soviétique, notamment pour ce qui concerne la menace qui plane sur Berlin, enfin d’admettre son droit à la réunification. De Gaulle fait observer au Chancelier qu’en regard de tant de requêtes, la France,elle, n’a rien à demander à l’Allemagne aux points de vue de son unité, de sa sécurité, de son rang, tandis qu’elle peut assurément, favoriser le rétablissement de son séculaire agresseur. Elle le fera – avec quel mérite !- au nom de l’entente à construire entre les deux peuples, ainsi que de l’équilibre, de l’union et de la paix de l’Europe. Mais la France pose ses conditions qui sont : l’acceptation des faits accomplis pour ce qui est des frontières, une attitude de bonne volonté pour les rapports avec l’Est, un renoncement complet aux armements atomiques, une patience à toute épreuve pour la réunification.

Ainsi la France et l’Allemagne furent réconciliées grâce à deux hommes qui surent se comprendre et s’apprécier.

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