Les institutions mises à mal ?

Je comprends que certains se plaignent de voir Nicolas Sarkozy se conduire en chef de parti ou l’UMP s’ingérer dans les affaire de l’État. C’est une dérive que je dénonce dans un billet précédent mais qui me paraît inéluctable compte tenu du quinquennat. A l’inverse s’il y en a qui ne devraient rien dire sur le sujet ce sont bien les socialistes . En effet ce sont eux qui, alors que le septennat était encore en vigueur, sont à l’origine de cette dérive des institutions. C’est la conduite qui est aujourd’hui la leur et qui consiste à dénoncer des faits dont ils ont usés et abusés qui m’amène à leur rafraîchir la mémoire. Petit rappel.

François Mitterrand a revendiqué avec force pour le président un rôle au moins aussi important que celui de ses prédécesseurs dans la conduite des affaires de l’État. Il serait aventuré d’en conclure qu’aucun changement n’a pu se produire dans le fonctionnement des institutions : Le PS, en effet, n’a jamais cessé d’exprimer à cet égard une conception bien différente de celle du chef de l’État.

Le texte le plus significatif en ce sens émane d’une personnalité qui à l’époque était très proche du président. C’est, en effet, Louis Mermaz, qui le 25 octobre 1981, a fait au micro d’Europe 1 la déclaration suivante :
« Le parti, c’est aujourd’hui ce qu’il y a d’essentiel pour nous. Le président de la République, le gouvernement, la majorité de gauche, en ce qui concerne le parti socialiste, la majorité absolue des députés socialistes, cela forme un bloc : le pouvoir. C’est le résultat de la conquête du pouvoir d’État. Mais pour que ce bloc ne s’endorme pas, ne se fossile pas, il faut qu’il y ait le parti, qui a un rôle fondamental à jouer. D’abord un rôle de réflexion, un rôle idéologique…Le parti a ensuite pour rôle de veiller à ce que le programme soit appliqué, d’être le gardien du programme. Par ailleurs, il doit empêcher que le pouvoir politique ne s’isole…Et il doit exercer, à travers le groupe parlementaire, le contrôle de l’action gouvernementale.« 

De tels propos montrent bien que ce n’est pas seulement un soutien que le président de la République doit attendre du parti socialiste : il y rencontre aussi une force politique qui considère qu’elle dispose d’une autorité propre, et qu’elle doit l’empêcher de s’endormir, de renoncer à l’application de certains aspects de son programme. Le parti socialiste prétend avoir barre sur le président : cela n’a t-il pas suffit à expliquer l’impossibilité pour François Mitterrand d’apparaître comme « le président de tous les Français » ?

Ce qu’on sait des petits déjeuners hebdomadaires qui ont réuni régulièrement à l’Élysée, autour du chef de l’État (1), les principaux dirigeants du parti socialiste et ceux de l’ancien « courant Mitterrand » avec certains ministres, n’a t-il pas démontré que les formules employées par Louis Mermaz, correspondent dans une certaine mesure, à la réalité ? Le président était contraint de composer sans cesse avec le parti : l’État est retombé dans la féodalité.

C’est à cause des prétentions du PS que le gouvernement de François Mitterrand a dû prendre des initiatives dont le seul but était d’apaiser le mécontentement des militants du P.S. En répondant à certaines de leurs marottes politiques. Qu’on songe par exemple à l’absurde projet de suppression de la mairie de Paris improvisé en juillet 1982, Qu’on songe au projet de loi concernant le statut de l’école privée, ou à celui de la presse. Chaque fois il s’est agi d’initiatives qui ne répondaient à aucune nécessité véritable, mais dont la seule raison d’être était d’apporter aux militants du P.S. (et à ceux de la F.E.N.) certaines satisfactions idéologiques, propres à leur faire tolérer la nouvelle politique économique du pouvoir.

En octobre 1984, le nouveau Premier ministre, Laurent Fabius, a constaté avec soulagement au cours d’un entretien télévisé, que les deux « épines » que constituaient le projet de loi scolaire et le projet de loi sur la presse avaient maintenant été enlevées. Mais qui donc les avaient enfoncées, sinon le prédécesseur de Laurent Fabius à l’Hôtel Matignon ? Et s’il s’agissait « d’épines », n’était ce pas la preuve que l’initiative de ces projets n’avait eu que des motifs partisans, et ne correspondait à aucune nécessité pour l’État, sinon à l’obligation où on l’avait mis de composer avec un parti ?

Alors voir aujourd’hui les dirigeants du parti socialiste, qui sont pour la plupart ceux qui ont été à l’origine de ce dévoiement de l’esprit de la constitution, se plaindre des pratiques qu’ils ont eux mêmes mis en place relève purement et simplement d’une faculté inouïe de se moquer du monde.

(1) François Mitterrand se conduisait en chef de parti en recevant les principaux dirigeants du parti socialiste.

Jospin c’était le mardi
Les socialistes des courants A et B c’était après le conseil des ministres.
Les responsables du PS le jeudi.

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