Le Tryptique : gel, efforts et cirque.

Nicolas Sarkozy a présenté au patronat et aux syndicats les mesures anti crise. Ces annonces ont été faites 4 jours seulement après l’annonce par le Premier ministre du gel des dépenses publiques pour les trois ans à venir. Parmi les mesures annoncées on note notamment : d’une part la fin « de l’aide aux ménages » c’est à dire la fin de la prime exceptionnelle de 150 euros aux trois millions de foyers les plus modestes. L’aide aux menages était une mesure de crise et par conséquent exceptionnelle. Tout le monde savait donc que ce n’était que temporaire. D’autre part la fin de l’aide « zéro charge » pour les très petites entreprises pour le 30 juin. Comme pour l’aide aux ménages, cela a été fait dans le même esprit. A noter cependant que la fin de la mesure au 30 juin ne met pas fin au principe. Ce qui signifie que si une TPE embauche au mois de juin, elle bénéficiera du zéro charge jusqu’en juin 2011.

En revanche les mesures qui ne sont pas remises en cause concernent celles en faveur des jeunes et des précaires. Ainsi les aides aux entreprises recrutant des jeunes en alternance par exemple sont prolongées. Par ailleurs, le chef de l’Etat a demandé au ministre du travail et de l’emploi de développer le tutorat des seniors. Peut être que dans son esprit il s’agit de préparer en douceur les partenaires sociaux à l’épineux sujet des retraites, sujet sur lequel les syndicats ont appelé à manifester le 27 mai.

Ces efforts demandés sont, bien entendu, non seulement nécessaires mais ils sont de plus tellement évidents, qu’on se demande pourquoi ils sont discutés. Il faut continuer dans cette voie et en ce qui me concerne j’ose espérer que le gouvernement ne reculera pas devant les cris de l’opposition et qu’il aura le courage d’aller au terme de la démarche engagée. Tous les pays d’Europe sont contraints à faire des efforts et même des efforts importants, mais je crois que pour qu’ils soient à la fois compris et acceptés, il faut qu’ils soient partagés de façon équitable et par tout le monde. Je trouve complétement ridicule le débat engagé entre le gouvernement et l’opposition sur la sémantique : effort, austérité, rigueur, c’est stupide. De toute façon même en temps normal un budget doit être géré avec rigueur et c’est ce qui manque depuis des années. Je suis contre l’hypocrisie même si je sais que la manière de présenter les choses a son importance, les gens aiment bien ça. Je crois surtout que ce qui est important c’est la finalité qui est de réduire l’endettement des pays et ce, non seulement pour nous mêmes mais surtout pour nos enfants et petits enfants. S’il y en a qui ne sont pas capables de comprendre ça, c’est regrettable. Bien évidemment quand on sait le nombre de ménages sur-endettés, on se doute bien que tout ça doit leur échapper. On est désolé pour eux, mais aujourd’hui on en est à apprendre aux gens qu’un crédit cela se rembourse.

Je reste persuadé qu’il n’ya pas d’autres alternatives malgré ce qu’on peut lire ça et là dans une certaine presse dite justement alternative et qui est très cosmopolite car on y trouve à la fois des illuminés, des idéalistes, des gens qui veulent refaire le monde, des révolutionnaires, etc….Oui, il faut faire des économies et il est dommage de devoir le répéter. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas choqué, mais alors pas du tout sur le fait que le gouvernement ait décidé de revenir sur certaines mesures qui par ailleurs n’ont jamais été annoncées comme étant définitives et c’est le cas des deux mesures que j’ai choisi de prendre comme exemple au début de mon texte. On vit une époque où la moindre mesure d’aide est considérée comme un avantage acquis auquel il ne faut plus toucher.

J’ai écouté Martine Aubry, j’ai écouté Ségolène Royal et je constate que ce qu’elles ont retenu c’est uniquement la fin de ces mesures transitoires créées pour aider momentanément les ménages les plus en difficulté. Je les ai écoutées, mais j’ai aussi regardé l’ensemble des mesures et surtout l’esprit qu’a voulu donner François Fillon. A l’analyse on constate que le gouvernement n’a pas tranché au hasard. François Fillon a dû travailler la dessus car son dessein est clair. Il a dissocié les mesures prises pour aider d’une manière transitoire le pouvoir d’achat et les mesures qui avaient pour but de soutenir l’emploi. Et il a fait son choix. C’est la raison pour laquelle on constate que à part les TPE, et encore, il n’interrompt pas la mesure en cours, il s’est efforcé de ne pas toucher aux mesures en faveur de l’emploi. En effet dans ce dispositif les mesures d’aide au chômage partiel et à l’apprentissage sont maintenues.

Nééanmoins on sait bien que cela ne suffira pas. J’ai soutenu la loi TEPA et je la soutiens encore. Mais il faut bien reconnaître que cette loi a été voulue et votée dans une période d’avant crise et qui donc ne correspond plus du tout à la période actuelle. C’est la raison pour laquelle je veux bien admettre que des mesures qui étaient tout à fait acceptables dans un autre contexte peuvent être aujourd’hui remise en cause et ajournées provisoirement. En disant cela je pense en particulier aux heures supplémentaires.

Ceci dit et après avoir écouté le Premier ministre, on est satisfait de constater que les efforts à consentir ne s’adressent pas qu’aux particuliers. Ils concernent également l’Etat puisque la véritable annonce c’est le gel des dépenses de l’Etat pour une période de trois ans. Il me paraît évident que cela ne suffira car comme comme je le disais dans un précédent billet depuis 1974 pas un budget n’a été voté à l’équilibre si ce n’est celui de 1980. je trouve donc la position du parti socialiste d’autant plus regrettable qu’il a une co-responsabilité sur les reproches que nous feront les générations à venir et qui seront justifiés. Franois Fillon veut donc une remise en ordre et on ne peut que l’encourager. Et puis,  en plus des efforts de l’Etat, il y a donc les efforts qui sont demandés aux citoyens. Je redis que si ces efforts ne sont pas répartis entre toutes les couches de la société cela ne peut pas réussir.

Au cours de ma carière professionnelle j’ai beaucoup pratiqué les organisations syndicales. Je crois les connaître assez bien ainsi que leur manière de fonctionner.  Le sommet social était prévu depuis un moment et en tous cas bien avant que ne soit annoncés le plan européen et le gel des dépenses publiques pour les trois ans à venir. Compte tenu de ce que demande l’Europe on pouvait penser que ce sommet social se déroulerait dans un climat de confrontation et d’affrontement. Et bien, pas du tout.

Je me souviens d’une réflexion que m’avait faite mon épouse à une certaine époque en consultant mon agenda. Elle me le met sous les yeux et me dit  » j’ignorais que chaque mois tu allais au cirque« . Je lui ai alors expliqué que chaque mois lorsque je recevais les organisations syndicales et que j’en mentionnais les dates sur mon planning, j’employais le mot « cirque. » C’est ce qui s’est produit,  je crois, lors de ces sommets sociaux qui sont généralement théâtralisés, c’est un jeu qui est orchestré à la fois par l’Élysée et par les OS. Chacune des deux parties mettant le curseur au maximum pour finalement arriver à un compromis. Cela a toujours été comme ça. L’une des parties doit présenter les choses en disant « on a pas cédé grand chose et en tous cas pas sur l’essentiel » et l’autre doit dire qu’elle a « obtenu des résultats« , en clair c’est le cirque. Dans ce cirque, le gouvernement présente sa réforme, les OS présentent leurs désaccords et on discute. A la sortie on se rend compte que seule la journée du 27 mai est maintenue pour une manifestation, ce qui n’est rien quand on se souvient que lors de la réforme de 2003, les journées de manifestations se succédaient. Ce n’est d’ailleurs pas faire injure aux OS que de constater que depuis le début de l’année toutes les manifestations ont été des échecs tant la mobilisation a été faible. Et puis si le sommet social s’est relativement bien passé c’est parce que les OS ont obtenu satisfaction sur un point important concernant les retraites à savoir l’élargissement de l’assiette d’imposition. C’était une mesure que Nicolas Sarkozy gardait sous le coude pour avoir selon l’expression ‘du grain à moudre« . Et il doit en avoir encore pour les futures négociations.

Et puis il ne faut se cacher que même pour les OS, la partie n’est pas facile compte tenu du contexte international et Nicolas Sarkozy le sait en fin politique qu’il est. Imaginons que les responsables syndicaux s’arc-boutent et refusent toute négociation et que dans 6 mois ou 1 an la France se trouve dans la situation de la Grèce aujourd’hui, c’est à dire attaquée par les marchés financiers ou dégradée par les agences de notation, nous serions alors dans une situation beaucoup plus difficile. Le chef de l’Etat le sait, les OS le savent. On devrait pouvoir trouver un accord, mais nous aurons quand même notre notre cirque ou notre pièce de théâtre, c’est comme vous préférez.

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