la securite des sites industriels sensibles

LA SECURITE DES SITES INDUSTRIELS SENSIBLES

 

Muriel RAMBOUR

Maître de Conférences à l’UHA

CERDACC

 

 

Mots-clés

Sites industriels sensibles – Sécurité intérieure – Terrorisme domestique – Directive 2012/18/UE (Seveso III) du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses.

 

Pour se repérer

Le survol d’installations nucléaires à la fin de l’année 2014, l’attaque d’une usine de gaz industriels en Isère en juin 2015, le vol d’explosifs dans un dépôt militaire suivi de l’incendie de deux cuves d’un site pétrochimique des Bouches-du-Rhône une vingtaine de jours plus tard, sont autant d’événements illustrant la difficulté de sécuriser les sites industriels sensibles français.

Pour aller à l’essentiel

La directive 2012/18/UE relative à la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses (JOUE L 197 du 24 juillet 2012, p. 1-37), dite « Seveso III », a pour objet de renforcer la transparence relative aux produits chimiques stockés sur les sites industriels classés. Entrée en vigueur le 1er juin 2015, elle concerne environ 10.000 installations dans les domaines des produits chimiques, pétrochimiques, le stockage et l’affinage des métaux. Elle impose aux Etats membres de l’UE la mise en place de plans d’urgence dans les zones environnant les établissements où se trouvent stockées d’importantes quantités de substances dangereuses (sur le contenu de la directive, cf. Muriel Rambour, « La Directive Seveso III », JAC, n°131, février 2013). La France compte 1.171 installations classées « Seveso », 656 en « seuil haut » et 515 en « seuil bas » (Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, « Mesures de sécurité au sein des établissements Seveso », juillet 2015, http://www.developpement-durable.gouv.fr/Mesures-de-securite-au-sein-des.html).

Conséquences des événements des dernières semaines qui montrent la vulnérabilité des sites industriels aux actes de malveillance et à la menace terroriste, le ministère de l’Intérieur a adressé dès le 14 juillet une note urgente aux préfets de zone de sécurité et de défense, de régions et de départements, dans laquelle il ordonne le placement de ces établissements – en particulier les sites Seveso – sous vigilance renforcée. La note recommande de mettre en place une inspection minutieuse des installations (notamment du point de vue de l’intégrité des enceintes et de l’opérationnalité des systèmes de vidéo-protection) et une surveillance accrue (renforcement des patrouilles jours et nuits aux abords des sites). Elle fait également obligation de recenser les points « sensibles ou emblématiques » dans chaque département, susceptibles de constituer « des cibles potentielles pour une action malveillante ».

Pour aller plus loin

La fin de l’année 2014 avait déjà été marquée par l’inquiétant survol de plusieurs sites abritant des activités nucléaires par des drones, à ce jour toujours non identifiés (Muriel Rambour, « Le nucléaire et le terrorisme », RISEO, 2015/2, à par.). Ces incidents ont incité les parlementaires à envisager les manières de sécuriser les installations nucléaires face à cette menace aérienne potentielle d’un nouveau genre (OPECST, Les drones et la sécurité des installations nucléaires, rapport n°267, janvier 2015). Adoptée dernièrement, la loi n°2015-588 du 2 juin 2015 (JORF n°126 du 3 juin 2015) vise à renforcer la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires. Elle instaure un délit applicable aux intrusions et tentatives d’intrusions terrestres (Marc Léger, « Le renforcement par le droit pénal de la protection des sites nucléaires contre les intrusions terrestres », JAC, n°155, juin 2015) et ouvre la réflexion sur les risques éventuels générés par les aéronefs pilotés à distance.

Confronté à la perspective de voir se développer une menace terroriste « éclatée, déstructurée, insaisissable et donc imprévisible » (interview de Jean-Charles Brisard, FigaroVox, 17 juillet 2015), le gouvernement réactive la démarche initiée en matière de sécurité nucléaire et entreprend de dresser plus précisément la liste des sites industriels susceptibles d’être visés et de consolider l’apprentissage des mécanismes de prévention et de riposte face aux attaques. Ainsi, à l’occasion d’une réunion de travail sur la sûreté des sites Seveso le 17 juillet (http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/2015-07-17_-_Sites_Seveso.pdf), le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie a annoncé que les industriels concernés devront répondre, d’ici fin septembre, à un questionnaire sur les mesures de sécurité et de vigilance qu’ils entendent mettre en place. Ils pourront s’appuyer sur le guide pratique de l’Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques (INERIS) recensant les points de vulnérabilité (modalités des contrôles d’accès aux sites y compris pour les sous-traitants, sécurisation des matériaux sur place, liaisons avec les forces de l’ordre…) face aux menaces d’actes de malveillance et de terrorisme auxquels ils seraient éventuellement confrontés. Par ailleurs, les 1.171 installations françaises classées Seveso feront l’objet d’une inspection d’ici fin 2015 et des exercices par zone de défense seront réalisés dans le même délai pour prévenir les actes de malveillance ou de terrorisme.