Incidences de la catastrophe de Fukushima sur le droit d’hébergement d’une mère japonaise
Commentaire de CA Toulouse, 11 mai 2015
Isabelle Corpart
Maître de conférences à l’UHA
CERDACC
Une mère qui, après le divorce, est autorisée à héberger son enfant lors de week-ends et de vacances, ne peut pas être empêchée à le faire parce qu’elle réside à proximité de Fukushima au Japon, mais hors de la zone identifiée comme dangereuse par les autorités locales à proximité du réacteur accidenté.
Mots clefs : accident industriel – autorité parentale – catastrophe nucléaire – danger (non) – divorce – droit au maintien de la vie familiale – droit aux origines – droit de visite et d’hébergement – risque sanitaire et alimentaire (non) – utilisation de Skype
Pour se repérer
Mlle Rie Y. et M. Julien M. se sont connus au Japon. Ils se marient en France à Toulouse en février 2007, peu de temps avant la naissance de leur fille Yûna le 11 avril 2007. En 2008, ils partent s’installer au Japon, donnant à leur fille bilingue une double culture. La famille quitte toutefois le Japon en 2011 à la suite de la catastrophe de Fukushima. En 2012, le mari dépose une requête en divorce, prononcé par jugement en date du 7 mai 2014. Concernant l’enfant, l’exercice de l’autorité parentale est maintenu en commun mais sa résidence habituelle est fixée chez son père, la mère bénéficiant d’un droit de visite amiablement déterminé ou prévu, à défaut, dans la région Midi-Pyrénées, la première moitié des vacances scolaires les années paires et la seconde moitié, les années impaires, et la totalité des vacances de fin d’année. Il est mis également à la charge de la mère le versement d’une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant sous la forme d’une prise en charge directe des frais de transports et des frais d’entretien de la fillette pendant le temps où elle est accueillie par sa mère. Mme Rie Y. interjette partiellement appel de cette décision, essentiellement pour pouvoir accueillir sa fille au Japon à son domicile à l’occasion des vacances scolaires.
Pour aller à l’essentiel
Un enfant a le droit de maintenir les contacts les plus étroits possibles avec chacun de ses deux parents divorcés, ainsi qu’avec sa culture et sa famille d’origine. En conséquence, il est conforme à l’intérêt de Yûna, bilingue et dont la famille maternelle réside au Japon de conserver des liens effectifs avec son pays d’origine et d’y séjourner durant ses vacances. Les inquiétudes, certes légitimes, du père quant à la situation sanitaire au Japon depuis la catastrophe nucléaire ne peuvent pas conduire à interdire la venue de l’enfant dans ce pays. En effet, les éléments obtenus sur le site internet du ministère des affaires étrangères français ne mettent pas en évidence de restriction à se rendre à Tokyo ou au Japon, à l’exception de la zone clairement circonscrite autour la centrale nucléaire accidentée à Fukushima. Il est entendu également que des contrôles effectifs et réguliers sont opérés concernant la sécurité alimentaire garantie aux japonais, les produits présentant des seuils de radioactivité dépassant le seuil légal étant retirés du marché et le provenance des denrées devant être obligatoirement étiquetée. Aucun danger particulier n’étant encouru par la fillette à vivre loin de la centrale, il convient de maintenir les relations entre l’enfant avec sa mère, mais aussi avec l’ensemble de la famille maternelle, tout en préservant son immersion dans sa culture d’origine. Il est ainsi prévu de permettre des connexions régulières par Skype entre la mère et sa fille, très éloignées géographiquement, d’inscrire la fillette dans une association franco-japonaise et surtout, d’autoriser sa mère à l’accueillir à son domicile japonais durant les vacances scolaires. La mère qui assumera les frais de trajets en avion et la prise en charge matérielle de la fillette durant les vacances est enfin dispensée de contribution à l’entretien et à l’éducation de sa fille.
Pour aller plus loin
Beaucoup de questions relatives à l’accident nucléaire de Fukushima ont déjà été abordées, y compris dans le Journal des accidents et des catastrophes, mais c’est la première fois, à notre connaissance, que le droit de la famille se trouve impacté. En effet, la décision rendue le 11 mai 2015 par la cour d’appel de Toulouse (n° RG : 14/03146) montre combien les relations familiales d’un couple franco-japonais se sont trouvées perturbées par la catastrophe de Fukushima.
En l’espèce, le père de Yûna s’est inquiété de la voir séjourner au Japon, dans un pays hautement sismique et la question des risques, notamment alimentaires et sanitaires, encourus sur place est analysée avec attention. En effet, la coparentalité maintenue depuis la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale entre les parents séparés et divorcés, conduit à préserver les liens de l’enfant avec ses deux parents (C. civ., art. 373-2, al. 1er). Hormis lorsque le couple opte pour une résidence alternée, la résidence habituelle de l’enfant est confiée à l’un des parents mais d’une part, ce dernier doit « respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent » (al. 2) et d’autre part, un droit de visite et d’hébergement est accordé au parent qui ne cohabite pas journellement avec l’enfant. Seule l’existence de motifs graves peut conduire à supprimer ces droits de visite ou d’hébergement (C. civ., art. 373-2-1, al. 2). Les droits de chacun des parents devant être respectés et l’intérêt de l’enfant étant de conserver des liens étroits avec ses père et mère, cette suppression est rarement prononcée.
Elle l’est parfois parce que l’un des parents a précédemment refusé laisser un enfant rentrer en France après des vacances (Cass. 1ère civ., 17 janv. 2006, Bull. civ., I, n° 10 ; JCP 2006. II. 10177, note Boulanger F.) ou eu égard à l’intérêt de l’enfant dont le père est poly-handicapé et dont le logement n’est pas adapté (Cass. 1ère civ., 9 févr. 2011, n° 09-12.119) ou encore dont le père est autoritaire, tyrannique et violent (Cass. 1ère civ., avr. 2015, n°14-15.369).
Toute la question était de savoir s’il pouvait être dangereux pour la fillette de passer ses vacances au Japon après la catastrophe nucléaire. En outre, en raison de l’éloignement géographique des familles, il fallait réfléchir aux moyens de préserver les liens mère/enfant en dehors du temps des vacances et de maintenir l’immersion de la fillette dans la culture japonaise.
I) La pertinence d’un droit d’hébergement au Japon après la catastrophe de Fukushima
Le père faisait état de risques sanitaires au Japon après le séisme de 2011 et l’accident nucléaire qui s’en est suivi, pour s’opposer non pas au droit de visite de son ex-femme mais au fait que celle-ci envisage d’héberger sa fille au Japon où elle exerce son métier d’infirmière.
Examinant la situation, les juges estiment que la fillette peut passer ses vacances au Japon car sa mère réside loin du lieu sinistré, relevant que le ministère des affaires étrangères français n’a pas mis de restriction pour les ressortissants français à se rendre au Japon à condition de respecter la zone clairement identifiée autour du réacteur accidenté. La fiabilité du zonage de sécurité fait par les autorités japonaises n’a pas à être remise en cause. On comprend néanmoins les inquiétudes du père, d’autant que la santé de sa fille pourrait être altérée également en raison de son alimentation. Là encore les juges rejettent ses arguments car une politique stricte a été mise en place au Japon pour assurer la traçabilité des produits et rendre impropres à la vente ceux qui dépasseraient le seuil légal de radioactivité.
Pour les juges de la cour d’appel de Toulouse, il convient dès lors de permettre à la mère s’exercer classiquement ses droits de visite et d’hébergement. La fillette pourra dès lors se rendre au Japon pendant l’intégralité des vacances de Noël et de Pâques et pendant 5 semaines durant les vacances estivales. Deux précisions sont apportées : Yûna, âgée de 8 ans, peut effectuer les trajets en avion seule en utilisant le service d’accompagnement de la compagnie aérienne et les frais de trajet sont entièrement à la charge de la mère.
Il n’est pas non plus tenu compte du fait que Mme Rie Y. sera amenée à travailler lorsque sa fille séjournera au Japon car elle peut recourir à l’entraide familiale et il n’est pas critiquable qu’elle songe à confier Yûna à ses proches durant son activité professionnelle. Ce qui importe c’est que la fillette ne coupe pas ses liens avec le Japon, même après la catastrophe de Fukushima.
II) La préservation des liens de l’enfant avec la culture japonaise
La mère et l’enfant ne pouvant se voir que durant les périodes de vacances, il fallait trouver des astuces pour qu’elles puissent conserver des liens effectifs et pour que la fillette bilingue reste imprégnée de sa double culture.
Les relations de l’enfant avec ses deux parents devant être respectées, lorsque les distances rendent impossibles des rencontres régulières, l’utilisation du téléphone, d’internet ou de Skype vient utilement au secours des familles, sans exclure les relations épistolaires. En l’espèce, le père se voit contraint d’installer un logiciel de téléphonie électronique de type Skype pour faciliter l’entrée en contact de la mère et de la famille. Il s’agit d’une utilisation gratuite et d’un accès aisé, ce qui ne justifie pas les réticences du père et une pseudo interdiction de son employeur d’utiliser à son domicile ce mode de téléphonie.
En outre, pour que Yûna ne perde pas l’usage de la langue japonaise et entretienne des relations avec sa culture d’origine, son père doit s’engager à lui permettre de fréquenter une association franco-japonaise toulousaine. Il lui est fait obligation de justifier chaque année de cette inscription auprès de son ex-épouse. Cette décision est conforme à l’intérêt d’une enfant issue d’un couple mixte et amenée à être régulièrement confrontée à des différences culturelles.
Rappelons aussi au père que tout obstacle opposé aux relations familiales est susceptible d’être sanctionné par un changement de la résidence habituelle de l’enfant qui séjournera alors essentiellement au Japon…
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CA Toulouse, 11 mai 2015, n° RG: 14/03146
EXPOSE DU LITIGE :
Rie Y. et Julien M. se sont mariés le 17 février 2007 à Toulouse (31), sans contrat de mariage préalable.
Yûna est née de leur union, le 11 avril 2007.
Julien M. a déposé une requête en divorce le 26 novembre 2012.
En l’état d’une ordonnance de non conciliation en date du 28 janvier 2013 ayant constaté l’accord des époux sur le principe de la rupture du mariage et autorisé la poursuite de la procédure ainsi que les époux à résider séparément, et d’une assignation en divorce délivrée par monsieur Julien M. à son épouse, par exploit d’huissier en date du 28 février 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Toulouse a, par jugement en date du 7 mai 2014 :
-prononcé le divorce entre les époux ;
-ordonné les mesures de publicité légale et la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux ;
-débouté monsieur M. de sa demande de désignation d’un notaire et renvoyé les parties à procéder aux opérations de compte et de partage, amiablement et par voie d’assignation en partage en cas de difficulté ;
-dit que les parties exercent en commun l’autorité parentale sur leur enfant mineur ;
-fixé la résidence habituelle de l’enfant chez le père ;
-dit que madame Y. bénéficie d’un droit de visite amiablement déterminé en France et à défaut :
*dans la région Midi-Pyrénées la première moitié des vacances scolaires de l’enfant les années paires et la seconde moitié de ces vacances les années impaires ainsi que la totalité des vacances de fin d’année,
*à charge pour madame Y. de confirmer par écrit au père les dates où elle viendra chercher l’enfant et l’adresse où elle séjournera et le numéro de téléphone fixe ou mobile sur lequel elle sera joignable en France durant cette période ;
-fixé la contribution de la mère à l’entretien et à l’éducation de son enfant sous la forme d’une prise en charge directe en nature des frais de transports et d’entretien de l’enfant pendant ses périodes d’accueil ;
-dit que chacun supportera ses propres dépens et débouté monsieur M. de sa demande en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration électronique reçue au greffe de la Cour d’Appel de Toulouse le 13 juin 2014, madame Rie Y. a interjeté appel partiel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions en date du 23 décembre 2014, elle demande à la cour, après avoir le cas échéant pris connaissance du dossier d’assistance éducative ouvert auprès du juge des enfants de Toulouse, de réformer le jugement entrepris sur les points suivants :
-dire qu’il appartient au père de faciliter les contacts entre la mère et l’enfant en installant dès le prononcé de la décision à intervenir une ligne téléphonique fixe avec un accès à Skype permettant des contacts en vision conférence avec l’enfant, au besoin sous astreinte de 50euro par jour de retard;
-dire qu’il appartiendra au père d’inscrire Yûna à l’association franco-japonaise de Toulouse afin qu’elle poursuive l’apprentissage du japonais et d’en justifier chaque année auprès de la mère ;
-dire qu’elle pourra accueillir sa fille au Japon à son domicile selon des modalités librement définies entre les parties et à défaut :
*durant les vacances scolaires de l’enfant correspondant aux vacances de Noël et de Pâques et les 5 premières semaines des vacances d’été ;
*dire que les déplacements entre la France et le Japon se feront dans le cadre de vols accompagnés TOKYO/TOULOUSE, chaque parent s’engageant à amener l’enfant et à le récupérer à l’aéroport voulu ;
*dire que monsieur M. devra chaque année communiquer à la mère le calendrier des vacances en cours ;
-dire que les frais relatifs aux séjours de l’enfant au Japon (dont les vols en avion) seront assurés par la mère ;
-dispenser madame Y. de plus ample contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant ;
-condamner monsieur M. aux entiers dépens de l’instance.
Dans ses dernières conclusions en date du 3 novembre 2014, monsieur M. demande de confirmer le jugement du 7 mai 2014 en toutes ses dispositions et de condamner madame Y. aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3000euro en application des dispositions de l’article 710 du code de procédure civile.
La Cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions.
MOTIFS DE LA DECISION :
Si la cour est saisie d’un appel général du jugement ayant prononcé le divorce entre les parties, il résulte des dernières écritures des parties que seules sont finalement discutées les dispositions du jugement relatives aux modalités du droit de visite et d’hébergement de la mère, à sa contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ainsi qu’aux dépens, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses autres dispositions.
Sur le droit de visite et d’hébergement de la mère :
Il convient de rappeler que l’enfant a le droit de maintenir des contacts les plus étroits possibles avec chacun de ses parents ainsi qu’avec sa culture et famille d’origine.
La loi présume par ailleurs que le maintien des relations avec le parent chez lequel il ne réside pas est conforme à son intérêt en prévoyant que seul un motif grave tiré de l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle au droit de visite et d’hébergement de ce parent.
En l’espèce, il n’est pas contesté que le couple parental après s’être rencontré au Japon a décidé de s’y installer à compter de 2008, dans les premiers mois de la vie de l’enfant et a finalement quitté le Japon en 2011 à la suite de la catastrophe de FUKUSHIMA; que madame Y. a laissé au Japon sa famille ce qui fait que Yûna y a laissé la branche maternelle de sa famille, ainsi qu’une composante importante de sa personnalité et de sa culture, l’enfant étant en effet bilingue.
Ainsi, quels que soient les projets que le couple a ensuite nourris en France et sur lesquels les parties sont actuellement en divergence, l’installation en France ayant marqué le début de la faillite du couple, il existait un accord des parties pour élever leur fille au Japon qui n’a été abandonné que dans la suite d’un événement fortuit.
D’autre part, les éléments versés aux débats de part et d’autre, y compris l’enquête sociale ordonnée par le juge conciliateur permettent de se convaincre de l’acuité du conflit qui oppose actuellement les parties autour de la question des modalités de vie de leur fille Yûna, mais ne suffisent en aucun cas à remettre sérieusement en cause les capacités éducatives de la mère, attestées par de nombreux témoignages versés aux débats par madame Y.
Devant la cour, madame Y. justifie également de la durée du trajet en avion entre le Japon et la France qui apparaît réalisable sur des périodes de vacances d’au moins quinze jours ainsi que la possibilité pour l’enfant, aujourd’hui âgée de 8 ans, d’effectuer le voyage avec le service d’accompagnement de la compagnie aérienne.
Par ailleurs, madame Y. a justifié dans ses dernières conclusions de son adresse au Japon et des conditions dans lesquelles elle exerce le métier d’infirmière à Tokyo, élément qui ne sauraient être ignorées de monsieur M., puisque le couple y a vécu, et qu’il n’est pas établi que les conditions d’existence de la mère à TOKYO diffèrent beaucoup de ce qu’étaient alors les conditions de vie du couple.
Le fait que madame Y. ne dispose certainement pas de neuf semaines de vacances à l’année, ce qui n’est pas contredit, n’interdit pas la prise en charge de son enfant pendant les vacances scolaires, madame Y. pouvant avoir recours à l’entraide amicale ou familiale, à laquelle monsieur M. a lui même également souvent recours, et au besoin à des systèmes institutionnels de garde d’enfants, étant particulièrement important pour Yûna de pouvoir partager du temps avec sa mère.
Pour couper court aux légitimes inquiétudes du père quant à la situation sanitaire au Japon depuis la catastrophe nucléaire dans un pays hautement sismique, les éléments obtenus sur le site internet du ministère des affaires étrangères français ne mettent pas en évidence de restriction à se rendre à Tokyo ni au Japon, à l’exception d’une zone très clairement identifiée autour du réacteur accidenté.
Ce site renvoie les ressortissants français à se conformer au zonage de sécurité défini par les autorités japonaises dont la fiabilité n’est pas remise en cause et insiste sur le fait que des contrôles effectifs sont opérés concernant la sécurité alimentaire qui conduisent les autorités à retirer du marché tout produit qui présenterait des seuils de radioactivité dépassant le seuil légal, avec un abaissement du seuil légal de tolérance depuis 2012 et un étiquetage obligatoire de la région de provenance des denrées, le ministère des affaires étrangères accordant sa confiance à l’IRSN, institut japonais de sécurité nucléaire quant aux informations publiées sur son site.
Enfin, quant à la crainte d’enlèvement international d’enfant, la convention de la Haye est désormais entrée en vigueur au Japon depuis le 1er avril 2014.
En conséquence, la décision entreprise apparaît absolument contraire à l’intérêt de l’enfant en ce qu’elle rend beaucoup plus difficile et onéreux le maintien des relations entre l’enfant et sa mère mais également prive Yûna de contacts avec sa famille maternelle et avec sa culture d’origine, sans raison objective.
Il convient en conséquence d’entrer en voie de réformation et de permettre à madame Y. d’accueillir sa fille à son domicile japonais, à ses frais, comme il sera dit au dispositif, sans qu’il n’apparaisse en l’état nécessaire de se faire communiquer le dossier d’assistance éducative ouvert auprès du juge des enfants de Toulouse et qui a abouti à une décision de non lieu à assistance éducative.
Il n’y a pas lieu d’enjoindre au père de communiquer le calendrier des vacances scolaires de l’académie auquel madame Y. peut avoir accès directement sur le site de l’académie de scolarisation de l’enfant.
Sur les relations mère/enfant :
Cette demande qui apparaît en lien direct avec la cause dont la cour est saisie, à savoir la question du droit de visite et d’hébergement de la mère et de l’organisation des modalités de vie de l’enfant du fait du divorce de ses parents, apparaît recevable en appel.
Il a été rappelé qu’il appartient aux parents de favoriser les relation de l’enfant avec l’autre de ses parents.
En l’espèce, compte tenu de l’éloignement géographique et de l’impossibilité pour la mère et l’enfant de se voir en dehors de certaine périodes de vacances, il est fondamental de mettre en place pour Yûna des modalités de contacts directs les plus souples possibles et à défaut d’accord entre les parents, les moins onéreuses, notamment par le biais de réseaux électroniques gratuits comme Skype, ceci n’interdisant bien sur pas les contacts épistolaires.
Pour s’opposer à la mise en place de ce mode de communication entre l’enfant et sa mère monsieur M. affirme sans en justifier que l’entreprise pour laquelle il travaille ne lui permettrait pas d’installer Skype sur son ordinateur pour des raisons de confidentialité mais la seule pièce qu’il produit correspond à une étude théorique sur l’utilisation des logiciels de téléphonie sur IP qui conclut à une fiabilité de ce procédé mettant en péril les programmes de recherche appliquées (p69) mais ne constitue en aucun cas la preuve d’une interdiction qui lui serait faite par son employeur d’utiliser à son domicile ce mode de téléphonie.
Madame Y. sera donc autorisée à entrer en contact avec sa fille au moyen d’un logiciel de téléphonie électronique de type SKYPE et monsieur M. enjoint d’installer ce type de logiciel, comme il sera dit au dispositif, étant ajouté en ce sens à la décision entreprise.
Il n’y a toutefois pas lieu d’imposer à monsieur M. l’installation d’une ligne téléphonique fixe qui ferait peser sur lui une obligation pécuniaire qui ne se justifie pas, ni d’assortir l’obligation d’installer un logiciel de type Skype d’une astreinte, étant observé que tout obstacle opposé aux relations entre la mère et l’enfant demeure susceptible d’être sanctionné par un changement de la résidence habituelle de l’enfant.
Sur l’accès de l’enfant à sa double culture :
Il s’agit également d’une demande qui se rattache par un lien suffisant aux causes dont la cour est saisie et qui est en conséquence également recevable en appel.
Il sera rappelé que l’enfant a le droit d’entretenir des relations avec sa culture d’origine.
Il n’est pas contesté que le couple a fréquenté à son arrivée sur le territoire français, ainsi que Yûna d’ailleurs, l’association franco japonaise où l’enfant a eu la possibilité de suivre des cours de japonais.
Actuellement bilingue, il est important que Yûna ne perde pas l’usage de cette langue.
S’il n’est pas contesté que le père parle couramment le japonais et que les membres de sa famille sont sensibilisés à la culture Japonaise, certains d’entre eux parlant le Japonais, ainsi qu’ils en attestent, il convient également pour l’enfant de sortir de l’omni-présence de sa famille paternelle et de côtoyer des Japonais.
Par ailleurs, le motif invoqué par monsieur M. pour s’y opposer, à savoir que les membres de cette association auraient pris le parti de madame Y. dans le cadre de la séparation du couple, n’est nullement établi par la seule pièce qu’il verse aux débats de ce chef à savoir une main courante qui n’émane que de lui même et qui ne remet pas en cause le comportement des membres de l’association de manière générale mais le comportement d’une amie de madame Y..
Il revêt une importance particulière pour l’enfant que ce que les parents avaient mis en place d’un commun accord et qui va dans le sens de son
intérêt, ne soit pas remis en cause du seul fait du conflit qui perdure entre les parents et dont il convient absolument de préserver Yûna.
Il sera donc ajouté en ce sens à la décision entreprise et monsieur M. justifiera annuellement au 1er septembre chaque année de l’inscription de l’enfant à l’association franco japonaise.
Sur la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant :
Madame Y. demande à être dispensée de contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant étant précisé qu’elle va prendre à sa charge les frais de transport de l’enfant lorsque Yûna se rendra au Japon et qu’elle ne remet pas en cause le principe selon lequel elle fera face aux frais d’entretien de l’enfant durant son droit de visite et d’hébergement.
Le premier juge a dit que la contribution de la mère à l’entretien et à l’éducation de l’enfant se fera par la prise en charge des frais afférents à l’exercice de son droit de visite et d’hébergement (en France) et en demandant la confirmation de la décision de ce chef, monsieur M. ne formule finalement pas d’autre demande de contribution.
La contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant prenant la forme d’une pension alimentaire servie au parent qui assume la charge principale, il n’y a en conséquence pas lieu de fixer de contribution de la mère à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, la décision entreprise étant infirmée en ce qu’elle a fixé autrement cette contribution.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
La décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle a laissé à chacun la charge de ses propres dépens et a respectivement débouté les parties de leur demande en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de l’article.
Eu égard à la nature du litige, les parties conserveront la charge des dépens par elles exposés à l’occasion du présent recours, monsieur M. étant en conséquence débouté de sa demande en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme la décision entreprise sauf en ce qu’elle a statué sur le droit de visite et d’hébergement de la mère et dit que la contribution de la mère à l’entretien et à l’éducation de l’enfant s’exercera sous la forme de la prise en charge des trajets en avion de l’enfant et de son entretien durant l’exercice du droit de visite et d’hébergement de la mère (en France).
Statuant à nouveau des chefs réformés :
Dit que madame Rié Y. pourra accueillir sa fille Yûna à son domicile au Japon durant la totalité des périodes de vacances scolaires correspondant aux vacances de Noël et de Pâques en France ainsi que durant les cinq premières semaines des vacances d’été à compter du 1er juillet de chaque année.
Dit que l’enfant pourra voyager avec le service d’accompagnement de la compagnie aérienne empruntée, selon le trajet TOULOUSE/ TOKYO/TOULOUSE, les frais du voyage et de prise en charge de l’enfant à cette occasion étant entièrement à la charge de la mère, chaque parent devant accompagner l’enfant à l’aéroport de départ à l’aller et le récupérer au retour, ou le chercher à l’aéroport de destination et l’y reconduire à l’issue du séjour.
Dispense madame Y. de contribution à l’entretien et à l’éducation de sa fille.
Y ajoutant :
Dit que monsieur Julien M. devra maintenir l’inscription de Yûna auprès de l’association franco japonaise pour y poursuivre l’apprentissage du Japonais et en justifier annuellement auprès de madame Y. au 1er septembre de chaque année.
Dit que monsieur Julien M. devra, dès le prononcé de la présente décision, installer un logiciel de téléphonie électronique de type SKYPE, afin de favoriser les contacts entre la mère et l’enfant.
Rejette le surplus des demandes.
Dit que les parties conserveront la charge des dépens par elles exposés à l’occasion du présent recours.