Quel pied de nez à ceux qui disent que la zone euro et l’euro sont la cause de tous les maux. L’année dernière pour faire face à la crise, le gouvernement anglais a dû d’emprunter 180 milliards d’euros et donc il s’est mis immédiatement dans le rouge avec un déficit de plus de 12%. A la suite des dernières élections, le nouveau gouvernement constitué d’une coalition entre les conservateurs et les libéraux démocrates n’avait pas d’autres choix que d’avoir le courage de faire face. Les anglais ne se cachent pas derrière leur petit doigt. Le ministre du trésor David Lodge a parlé franchement et il a employé le terme d’austérité. Les anglais ont le mérite de ne pas faire usage de la langue de bois et ils annoncent d’une façon très claire et sans la moindre ambiguïté que le plan qui va venir sera beaucoup plus fort que ce qui a été annoncé dans un premier temps. Pour beaucoup d’observateurs de la presse écrite et radio-télévisée, cette coalition était contre nature et ne devait pas durer. Certains d’entre eux prévoyaient même de nouvelles élections d’ici 6 mois. Je ne suis pas sûr que ce pronostic soit le bon. En effet, et à moins d’être masochiste, je ne vois pas un gouvernement lancer un tel plan de rigueur et faire des élections 6 mois après car c’est aller vers un échec assuré. On peut donc légitimement penser que cette coalition va durer plus longtemps que prévue. C’est ma première observation concernant l’Angleterre.
La seconde c’est que ce premier plan de 7 milliards d’euros frappe les esprits car il va être suivi d’un deuxième plan dont on dit qu’il sera pire que celui de Margareth Tatcher en 1979. La dame de fer, on s’en souvient, avec des méthodes bien à elle, avait redressé l’économie anglaise. Si ce redressement a été indéniable, il n’en reste pas moins qu’il avait laissé des cicatrices et des douleurs très fortes dans la société anglaise. La situation de l’Angleterre impose peut être de passer à nouveau par là. Néanmoins le problème anglais, on va le retrouver dans tous les autres pays européens, zone euro ou pas. Ce problème est de résoudre l’équation que posent tous ces plans de rigueur et d’essayer malgré tout de ne pas casser la croissance qui est déjà très faible en Europe. Il faut savoir par ailleurs que l’Europe est la zone la plus déprimée du monde.
C’est là que se situe un problème majeur et cela m’améne à faire deux observations. La première nous concerne et c’est celle-ci : a quand la France ? En effet on sait que l’Espagne, l’Italie, la Grèce, l’Allemagne et aujourd’hui l’Angleterre ont engagé leur plan de rigueur. Quoique l’on en dise, quoique l’on essaie de nous faire croire il y a chez nous un plan de rigueur en cours et c’est incontestable mais on pas (encore) réduit les salaires des fonctionnaires, on a pas encore annoncé des mesures spectaculaires, si ce n’est des économie dans les ministères. Si on en vient aux mesures prises par nos voisins ça risque de tanguer quand on connaît la culture syndicale française. Mais nous dit-on, on n’en est pas encore là.
La seconde observation c’est que l’on observe également que tous ces plans se font encore dans un schéma national. Pourquoi n’essaie t-on d’harmoniser un plan européen valable pour tous les pays en tenant compte de la situation et la spécifité de chacun ? En effet, la situation de la France n’est pas celle de la Grèce et celle de l’Allemagne n’est pas celle de la France. Mais enfin pourquoi les 27 n’essaient-ils pas de travailler ensemble afin d’apporter une réponse commune à la crise ? C’est ça qu’il faut, il ne faut pas que chacun dans son coin essaie de trouver ses propres solutions qui seront de toutes façons insuffissantes. Puisque, il faut le dire encore une fois, que l’Europe forme un marché important (1ére zone commerciale du monde) il importe donc d’apporter à ce marché une réponse politique qui soit à la hauteur des enjeux.
Il ne faut surtout pas se voiler la face car effectivement l’ inquiètude est réelle. Et c’est la raison pour laquelle une harmonisation au niveau des 27 est nécessaire. C’est le prix nobel d’économie Joseph Stiglitz qui pense que si tous les pays européens prennent au même moment, tous et chacun de leur côté, des mesures d’austérité, alors il y a un vrai risque sur la croissance, sur la consommation et donc non seulement une envolée du chômage mais plus encore, un risque d’aller vers la dépression et la déflation. Il y a quand même là une vraie inquiètude car à partir du moment où tous les pays au même moment prennent des mesures aussi drastiques, il y a effectivement le risque d’aller encore plus mal et l’Europe est déjà la plus mal placée en terme de croissance. En même temps et c’est là que que les choses se compliquent, que faire d’autres quand il y a des déficits aussi importants dans tous les pays d’Europe ? C’est vrai qu’il y a une vraie contracdiction qui est difficile à régler. Tout démontre que c’est sans doute au niveau européen qu’il aurait fallu agir et peut être justement agir de façon concertée pour que tous les pays au même moment ne prennent pas le même type de mesure. On ne comprend pas que l’on ait pas une action européenne coordonnée et cohérente, d’autant qu’on connaît les conséquences de ce type de plan de rigueur car le FMI l’a appliqué à pas mal de pays, rappelons nous l’Argentine où ça été une catastrophe c’est à dire que la rigueur qui n’est que rigueur conduit à la catastrophe .
Les marché boursiers sont inquiets. Ils sont inquiets parce que il y a de nombreux déficits et ils le sont à juste titre pour deux raisons. La première parce qu’ils se disent que les pays ne peuvent plus vivre à crédit et qu’ ils vont éprouver de la difficulté à remboursser les prêts qui leurs sont accordés. La seconde raison de leur inquiètude, c’est parce qu’ils se disent également que maintenant, ces mêmes pays ne vont pas pouvoir faire de croissance parce qu’ils ont ces plans de rigueur qui vont plomber la reprise et que du coup ils ne pourront pas non plus remboursser faute de croissance. Voilà pourquoi les marchés font du yoyo. En ce qui concerne notre pays, la France, nous empruntons aujourd’hui à un taux d’intérêt particulièrement intéressant entre 2,5 et 3%. il suffirait que l’on dégrade la note et on passe immédiatement à 4 ou 5 % et à ce moment là, la situation devient explosive.
Il y a donc un autre défi à relever qui est celui du discours sur l’accompagnement de toutes ces mesures dans les pays européens. Il y a eu, on s’en souvient, la chute de Leman Brother, il y a eu la situation de la Grèce et on se retrouve aujourd’hui dans une troisième étape qui est celle de l’austérité et les français sont persuadés qu’elle s’applique d’une manière générale même si les mots ne sont pas dit. La vraie interrogation c’est que aujourd’hui on ne voit plus très bien ce vers quoi nous amène le politique, c’est à dire qu’on a eu le sentiment qu’il ya eu deux moments forts avec deux étapes de prise de conscience. Aujourd’hui nous devons faire face à cette troisième étape qui est celle de la rigueur et qui apparaît comme étant relativement forte et relativement drastique. Il est donc clair que l’on se pose des questions sur les conséquences de ces mesures et c’est la raison pour laquelle il faut mettre en place un processus d’accompagnement parce qu’il doit y avoir un véritable travail de pédagogie qui doit être fait non seulement auprès des français mais également auprès des peuples européens. Je crois que ce message n’est pas aujourd’hui suffisamment délivré ni en France ni au niveau de l’ensemble l’Europe. Depuis des années, il y avait un aspect de notre économie sur lequel on considérait que les français mettaient toujours de la distance et c’est l’aspect relatif aux déficits ou dans un passé encore récent nos concitoyens pensaient que ce n’était pas particulièrement important , que ce n’était pas grave et que d’une manière générale on a jamais vu un État faire faillite. Depuis quelques mois on a pris conscience que les déficits accumulés depuis 1974 sont un vrai sujet et qu’ il y a là un vrai enjeu. On a donc une population qui aujourd’hui est beaucoup plus capable d’entendre des messages, mais ces messages ne sont pas suffisamment exprimés pour expliquer le pourquoi et le comment.
Autant je n’admets pas l’attitude du parti socialiste qui pendant les 15 ans qu’il a gouverné le pays n’a jamais voté un budget en équilibre, autant je ne fais pas partie de ceux qui sur ce sujet donnent tort aux syndicats, je ne critique pas leurs prises depositions. Il me paraît tout à fait normal qu’ils s’inquiètent et veulent défendre les intérêts des salariés. Qu’on le veuille ou non la crise n’a pas été provoquée par les salariés. C’est une crise financière qui a été provoquée par l’endettement des États et par suite par la spéculation mais à l’arrivée ceux qui vont payer le plus lourd tribut ça va justement être les salariés. Il nous faut quand même admettre cette réalité. Cela va être de la baisse du pouvoir d’achat, de la hausse du chômage, donc ce n’est pas non plus anormal que les syndicats fassent leur travail qui est de défendre les interêts des salariés. D’un autre côté les syndicats doivent admettre que la situation du pays est telle que l’on ne peut indéfiniment prendre des mesures qui nous font vivre avec de l’endettement et des déficits chaque année.
La bonne question est de savoir quelle est la meilleure façon de défendre les salariés sans mettre le pays à feu et à sang. Pour revenir à cette idée de gouvernement économique européen, aujourd’hui on peut penser que en cette période, la baisse de l’euro est une aubaine pour ne pas dire une bénédiction car dans la situation actuelle cela redonne de la compétitivité à l’Europe et la France pourrait en être un des bénéficiaires.
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