On peut toujours préférer la mort à la vie, sous prétexte que la vie est souvent douloureuse… Ceux qui posent le problème en termes de condamnation de l’économie de marché et du libéralisme sont dans l’erreur, ils proposent des mauvaises réponses à une bonne question : celle de la nouvelle régulation à mettre en place.
Raisonner ainsi, c’est se référer implicitement à l’existence d’un modèle économique alternatif qui, sous le contrôle démocratique de l’État, interdirait les excès dangereux des agents économiques et produirait une richesse plus justement répartie. Cette utopie, en dehors même du fait qu’elle a fait faillite au XXe siècle, ce qui devrait la condamner sans appel, souffre d’un vice de conception définitif, en ce qu’elle sacralise et » totémise » l’État, qu’il soit d’ailleurs démocratique ou non. En prêtant quasi religieusement (le » culte de l’État « ) une » pensée « », une » volonté » et une « sagesse toute puissante » à ce qui reste simplement une organisation humaine dont le fonctionnement est régi par des règles établies par des hommes, cette utopie n’a pour effet que de confier cette toute puissance à quelques hommes encadrés dans le meilleur des cas par des lois. Élus ou fonctionnaires, ils ne savent pas tout. Et de deux choses l’une :
Soit, à supposer qu’ils fussent vertueux, ils exerceraient leurs responsabilités à la tête des entreprises ou des banques qu’ils dirigeraient pour le compte de cet État » totem « , en respectant des priorités et les objectifs désignés par ses dirigeants (c’est ce qui fut tenté après-guerre avec la planification).
Soit ils les exerceraient comme un patron du privé, respectueux du marché, ce qui ne changerait rien.
Dans le premier cas, dans le monde d’aujourd’hui, qui se réinvente tous les jours, et dont les progrès ne sont pas » programmables « , c’est la certitude de passer à côté de tout ce qui représente les vecteurs de croissance. Ce type de gestion, où c’est le politique qui arbitre les priorités, et non le marché, est incapable d’inventer » Google « . Au mieux, il peut seulement inventer le « plan calcul « . Au pire, ça donne la Corée du Nord. En un mot, ça ne » marche pas « , et ça s’est toujours fini par un désastre. Dès le XVIIe siècle, l’économie de marché a été théorisée comme seul système économique possible, en ce sens qu’elle permet cet arbitrage des priorités par la libre fixation des prix et par la concurrence, en un mot par la liberté de choix qui est donnée aux citoyens. L’économie de marché et le libéralisme vont de pair. Ils privilégient l’expression du désir de chacun. Le rôle de l’État est alors vu comme celui d’un arbitre, garant du respect de règles arrêtées démocratiquement, qui permettent à chacun de profiter de sa liberté. Car, comme le dit le proverbe : » La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres… » L’économie de marché et le libéralisme ne peuvent donc se concevoir sans ces règles. La crise que nous vivons a pour origine une régulation des marchés financiers qui n’est plus adaptée, ou plutôt qui a laissé se développer toute une activité spéculative en dehors de son cadre. Quand les leçons de la crise seront tirées, de nouvelles règles devront être adoptées. C’est le défi qui doit être relevé. Pour permettre à la liberté de chacun de s’exprimer, à l’économie de poursuivre sa création de richesses, et à de plus en plus de millions de personnes sur la planète d’échapper à la misère.
Il y a et on les connaît, des économistes qui se référent à l’existence d’un modèle économique alternatif. Ils ne sont pas très nombreux et ne sont guère crédibles pour une raison que j’ai déjà expliqué ici, c’est que contrairement à la plupart d’entre nous qui nous faisons une idée à partir de faits, eux fondent leur argumentation et leurs critiques à partir de convictions qu’ils se refusent à remettre en cause c’est à dire à partir d’une idéologie (c’est ce que je pense, si je le pense c’est que c’est bien pour la collectivité et donc, c’est ce qui doit se faire). Les faits ils s’en moquent même s’ils leurs donnent tort (dans ce cas c’est aux faits de s’adapter à leur façon de penser). Pourquoi ? Tout simplement parce que l’économie alternative trouve son fondement dans les utopies communautaires et libertaires de la seconde moitié du 20 éme siècle. Le courant alternatif est constitué de quelques utopistes mais surtout d’idéologues qui ne supportent aucune contradiction et pour qui l’économie de marché et le libéralisme représentent l’horreur dans toute sa splendeur. Ce courant de pensée reste néanmoins ultra minoritaire et c’est heureux. De ma génération, on y trouve des ex soixante-huitards.
Dans le journal « les échos » du 26 août 2009 Michel Rocard écrit « j’ai mis des décennies à apprendre l’économie de marché aux socialistes. » C’est finalement le revirement du gouvernement Mauroy en 1983 qui amène la gauche réformiste à accepter cette économie de marché et, c’est sous le gouvernement Jospin que les privatisations ont le plus rapporté : 210 milliards de francs.
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