La réforme des retraites voulue par François Fillon en 2003 aligne la durée de cotisations des fonctionnaires (pour une retraite à taux plein) sur celle des autres salariés et programme, pour tous, un nouvel allongement d’ici à 2012. elle ne touche pas les régimes spéciaux. Elle a eu le soutien de la CFDT par son secrétaire général François Chérèque qui n’est prêt de l’oublier tant il y a eu une fuite des adhérents qui sont allés grossir les rangs de Sud.
Jacques Voisin le président de la CFTC a déclaré l’année passée « C’est parce que les dirigeants de la CFDT sont toujours prêts à faire des concessions, à se compromettre avec le gouvernement et le patronat, à accompagner le système, pour que la pilule soit moins amère à avaler par les salariés du privé, les agents du public, les demandeurs d’emploi et leurs familles, que le monde du travail n’a rien à attendre de cette organisation . » En fait ce que dit Jacques Voisin n’a rien à voir avec le réformisme de la CFDT, mais tout simplement on peut voir dans cette déclaration le fait que le président de la CFTC, n’a toujours pas encaissé la loi sur la représentativité syndicale.
Le vrai duel aujourd’hui est encore entre la CGT de Bernard Thibault et la CFDT de François Chérèque. Les deux hommes ont adopté une stratégie différente sur l’inévitable réforme des retraites. Il faut qu’ils se fassent entendre des salariés, du patronnat et du gouvernement. Partant du fait de stratégies différentes dont l’unique objectif est de dominer le paysage syndical, il me paraît évident que seul l’un d’entre eux obtiendra gain de cause. Alors lequel ?
On vient de s’en rendre compte il y a peu avec la grève à la SNCF, que dans l’ensemble on a peu compris, que la CGT est attaquée sur sa gauche par Sud. Guillaume Pepy a tenu et après 15 jours de grève les cheminots n’ont rien obtenu même si la CGT a tenté de proclamer le contraire. Pour faire face à Sud, Bernard Thibault, qui paraissait relativement réformiste il y a encore peu, a été obligé de durcir ses positions. C’est ainsi que sur la réforme des retraites il ne veut rien entendre, il est sur une position très radicale. Alors que le gouvernement consulte, Thibault estime que tout est prévu d’avance, qu’il n’y a rien à négocier. De toutes façons pour lui c’est non à tout. Non au recul de l’âge de la retraite, non à l’allongement de la durée des cotisations, non à la baisse des pensions, non à l’augmentation des cotisations. La CGT souhaite mobiliser un maximum de salariés du public et du privé et organiser de grandes manifestations. Son programme est connu. Pour ceux qui comme moi ont cotoyé les syndicalistes de la CGT il n’y a pas de nouveauté. On est revenu aux discours de l’avant Thibault réformiste. C’est donc un net recul dans le dialogue social, imputable à la CGT, tout au moins dans le dialogue officiel, celui adressé aux médias et destiné à être diffusé. Je pense que dans les salons feutrés des salles de négociations Thibault doit être moins radical.
François Chérèque se montre d’avantage compréhensif ce qui ne veut pas dire complaisant, il veut obtenir un compromis ce qui ne veut pas dire qu’il va se compromettre. Lui ne dit non qu’au seul recul de l’âge légal de la retraite. Il veut garder l’âge légal à 60 ans et faire en sorte par la suite que les choix soient individuels. Il reproche par ailleurs au gouvernement non pas le manque de concertation, mais de vouloir aller trop vite. Quoiqu’il en soit à la différence de Thibault, Chérèque ne se situe pas dans un rapport de force avec le gouvernement.
Sur le plan de la communication également, la stratégie des deux hommes est différente. J’avoue regarder assez peu la télévision et bien que je n’ai vu aucune des émissions en question, j’ai appris en lisant la presse que Chérèque est passé dans plusieurs émissions de télévision à des heures de grande écoute et que son discours est à chaque fois le même : la réforme des retraites doit se faire , mais avec la CFDT. Thibault est semble t-il moins vu ou entendu à la radio et à la télévision.
Je ne crois pas que les deux hommes se soient partagés le travail : médias, programme, appel à la grève, manifestations… Non, je crois au contraire qu’il y a vraiment une énorme lutte d’influence pour dominer le paysage syndical. Une réforme comme celle des retraites en est un des moyens importants et pour eux il ne faut pas la laisser passer. L’un veut se faire remarquer comme étant le garant des avantages acquis et qui ne doivent en aucun cas être remis en question, l’autre est sur une ligne plus réformiste et il se montre moins intransigeant car plus lucide. Je suis quasiment certain que ce serait également la position de Bernard Thibault s’il n’était pas concurrencé sur sa gauche par les extrémistes de Sud . Thibault ne veut pas qu’il arrive à la CGT ce qui est arrivé à la CFDT en 2003.
Nicola Sarkozy et Bernard Thibault se connaissent bien.Lorsque EDF a dû s’ouvrir à l’Europe Sarkozy a exigé de Chirac de rester le maître des négociations, il ne voulait pas que les collaborateurs du président s’en mêlent. Chirac a accepté. Sarkozy alors ministre de l’économie se refusait à toute privatisation à cause des centrales nucléaires.. On se souvient des coupures sauvages d’électricité ainsi que des centres de distribution occupés par les grévistes. La CGT voulait faire plier le gouvernement sur son projet de transformation d’EDF en société anonyme. C’est Nicolas Sarkozy qui s’est opposé à l’envoi des CRS mais il a pris Bernard Thibault entre quatre yeux et l’a menacé de dévoiler les combines de la CGT si elle persitait. On a jamais su ce que sous entendaient ces menaces. Toujours utile que Thibault a plié mais il a eu sa contre partie. En effet ce que le grand public n’a pas su, ce sont les avantages considérables qui ont été maintenus à savoir le staut, le système des retraites et même des créations d’emploi. EDF a été tranformée en société anonyme. Tout s’achète et tout se vend y compris la paix sociale.
Dans ce combat Thibault / Chéréque, il n’ y aura qu’un seul gagnant et par conséquent un perdant. Je ne vois de match nul. Les positions, les stratégies sont trop différentes.
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