avril 2014

« L’indépendance est un statut, l’impartialité une vertu »
Robert Badinter

Edito


Claude Lienhard,
directeur du JAC

( Photo CERDACC. Jo L.)

NAUFRAGE

Le naufrage, le 16 avril 2014, du ferry sud-coréen SEWOL a pris, dans le sillage de la disparition du vol MH370 de la Malaysia Airlines, une dimension planétaire. Les distances sont abolies.  L’émotion et la souffrance partagées. Le drame du SEWOL a touché majoritairement des enfants et adolescents puisque le ferry transportait 362 lycéens  en voyage scolaire.

La polémique naissante sur le comportement du capitaine n’est pas sans rappeler le naufrage du Costa Concordia. En même temps, il apparaît que des  membres de l’équipage se sont sacrifiés. Une semaine après le naufrage, 150 corps ont été récupérés et 152 personnes sont toujours portées disparues, présumées mortes. Un mémorial a été érigé au sein du Lycée d’où venait la grande majorité des jeunes victimes. Comme toujours, la parole politique a tenu à s’exprimer. La présidente de la Corée du Sud allant jusqu’à accuser les équipages  du ferry de meurtre. Il est vraisemblable que la colère des familles des victimes n’est pas près de s’éteindre.  Le pouvoir politique est aussi frappé de plein fouet par la démission du Premier Ministre !

 

RANA PLAZA, SOMBRE ANNIVERSAIRE

En avril 2013,  l’effondrement du Rana Plaza avait entraîné le décès de 1.138 ouvriers et blessé plus de 2.000 personnes. Le drame du 24 avril 2013 avait frappé l’opinion mondiale doublement : par son ampleur d’une part et d’autre part  parce que son drame renvoyait les sociétés occidentales et européennes à un rapport d’exploitation avec les ouvriers du Bangladesh.

Les ouvriers du Bangladesh sont, comme on a pu les dénommer, les damnés du low-cost. Les petits prix de nos habits ont un grand prix payé par d’autres. Comme toujours au-delà de l’indignation et des discours convenus, il convient de voir ce qu’il a pu en être des postures des uns et des autres dans la durée. Force est de constater que le fonds d’indemnisation des victimes auquel devaient contribuer les grands groupes de distribution de vêtements n’a toujours pas vu le jour, ou en tout cas n’est pas opérationnel.

Sur la scène judicaire française, la société Auchan qui est visée par une plainte déposée au procureur de la République de Lille par les associations SHERPA, Peuple solidaire et le collectif Ethique. En effet, les étiquettes de la marques In extenso  d’Auchan ont été retrouvées sur place. Auchan prétend avoir été victime d’une sous-traitance et n’avoir aucun lien direct ou indirect avec les entreprises travaillant sur le site. A travers cette plainte aux aspects bien symboliques, c’est la question de la responsabilité sociale des entreprises qui est posée.

 

HOMMAGES

Boston d’abord : un an après les attentats qui avaient fait 3 morts et 125 blessés,  le célèbre marathon a eu lieu. Sous le double sceau de la sécurité et du souvenir. Bien sûr, la capitale du Massachussets des 36.000 marathoneurs et marathoneuses.

Hommage encore dans une enceinte sportive, dans un énorme mouvement de foule, dans une tribune surpeuplée lors d’une rencontre de coupe entre les Reds d’Arsenal et Nottingham.

L’hommage a pris ici la forme de 96 sièges du stade de Wembley laissés inoccupés. 25 ans après, la colère n’est pas encore éteinte.

Il aura fallu 20 ans pour que le combat des victimes soit entendu et  pour que le Premier ministre de l’époque Gordon Brown crée une commission indépendante d’enquête pour faire une lumière sur les responsabilités des forces de l’ordre. Suite à ce rapport, une nouvelle enquête a été mise en œuvre et une procédure judiciaire a été mise en œuvre et est toujours en cours.

Hommage toujours, en Pologne cette fois,  où une commémoration a eu lieu à Varsovie à l’occasion du 4e anniversaire du crash le 10 avril 2006 du Tupolev officiel TU-154 du Président Lech Kaczynski qui s’était écrasé près de l’aéroport de Smolensk à l’ouest de la Russie.

 

L’ACTUALITE DU « MEDIATOR »

C’est d’abord le décès de Jacques SERVIER, président et fondateur du groupe pharmaceutique français Servier, le 16 avril 2014 à son domicile.

Irène FRACHON, pneumologue à l’origine des révélations du scandale du Mediator, on dirait aujourd’hui « lanceur d’alerte », a rappelé que « c’est un champ de ruine et de désolation que laisse ce vieil homme mais il a été démasqué avant de partir. »

Jacques SERVIER a adressé un mail posthume aux 5.000 salariés et collaborateurs de son groupe et a organisé méthodiquement sa succession dans le cadre d’une fondation néerlandaise contrôlée par des associations sans but lucratif, pour la plupart émanation de différentes sociétés du groupe, comme l’a révélé le Journal du Dimanche du 20 avril 2014.

Comme systématiquement lors d’un décès d’une personnalité, surtout si elle est contestée, les réseaux sociaux n’ont pas manqué de réagir.

Le décès du fondateur du Groupe Servier vu du côté des victimes laisse beaucoup d’amertume car bon nombre d’entre elles n’atteindront sans doute pas l’âge de 92 ans comme elles le font remarquer.

Bien sûr la justice, au-delà de l’extinction de l’action publique à l’encontre de Jacques SERVIER personnellement, continuera son chemin tout comme le Laboratoire qu’est Servier  continue à construire des partenariats avec des instituts académiques et d’autres entreprises pour assurer son avenir, comme on le relève dans les rubriques économiques.

Mais on en est loin d’avoir fini avec l’affaire du Mediator.

Elle animera encore l’actualité et les prétoires comme le démontre l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de Cassation le 11 mars 2014, la Cour rappelant que la publication de citations extraites de procès-verbaux d’audition d’un témoin dans le cadre d’une information longue et complexe ayant trait à un problème de santé publique ne porte pas atteinte au droit à un procès équitable ni à l’autorité et à l’impartialité de la justice.

 

Nouvelle illustration, si besoin était, du droit d’en parler tout comme la relaxe de l’ancien directeur de la publication de Libération, Nicolas DEMORAND, par la Cour d’appel de Paris dans le cadre des poursuites en diffamation engagées contre lui par les Laboratoires Servier pour un éditorial du 7 septembre 2011 relatif au scandale du Mediator.

Nicolas DEMORAND est relaxé au titre de la bonne foi, au regard du genre particulier que constitue l’éditorial, un journal dans lequel une plus grande liberté de ton est admise.

Dont acte !

 

Les hasards de l’actualité, à supposer qu’il s’agisse de réels hasards, nous ont montré que la trop grande proximité du pouvoir politique et de l’industrie pharmaceutique restait une question d’actualité.

La démission d’Aquilino MORELLE, en raison du conflit d’intérêt supposé en raison de son appartenance à l’IGAS (organe de contrôle des laboratoires pharmaceutiques), vient le souligner.

La question des conflits d’intérêt dans le monde médical reste bien délicate.

 

Deux autres informations dans ce sillage méritent d’être rappelées. Ainsi, une enquête préliminaire a été confiée à la brigade de répression de la délinquance économique pour favoritisme et détournement de fonds publics dans l’attribution du marché des vaccins en octobre 2012.

 

Par ailleurs on apprend encore par une publication de Médiapart qu’un essai clinique réalisé dans l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière et publié dans la notoire revue New England Journal of Medicine et concernant une avancée prometteuse pour le traitement des maladies auto immunes aurait été basé sur des données « fabriquées » et embellies – résultat : décès.

 

A tout le moins, tout cela fait désordre !

 

LA FRANCE TREMBLE

Un séisme de forte magnitude a secoué le sud-est de la France.

D’une magnitude de 5 sur l’échelle de Richter, ce séisme a généré à tout le moins 10 secondes d’angoisse.

Ce séisme du 7 avril 2014 est venu rappeler que la France, et plus particulièrement le sud-est de la France, n’est pas à l’abri d’un événement sismique d’une grande ampleur.

Il n’est pas certain que l’ensemble du parc immobilier soit aujourd’hui aux normes requises en la matière.

Sans vouloir se montrer pessimiste à l’excès, on nous annonce par ailleurs pour l’été à venir une résurgence  de phénomènes climatiques extrêmes.

Telles sont les prévisions de l’Organisation météorologique mondiale.

Au programme : chaleurs, sécheresses et inondations avec le retour de El Nino.

 

C’est dans cette ambiance que l’on signalera la naissance d’un nouveau magazine grand public dédié à la météo et aux phénomènes climatiques « Climat et Catastrophes Naturelles ».

 

Pour rester dans cette tonalité, on rappellera que le 5ème rapport du GIEC publié le 13 avril 2014 prévoit une élévation des températures de 3,7 à 4,8 °C d’ici 2100 avec les conséquences que l’on peut imaginer.