ACQUEREUR GARANTI CONTRE LE RISQUE EXPERTISE EN PRESENCE DE TERMITES
Commentaire de Cass. ch. mixte, 8 juillet 2015, n° 12-26.686
Lorsqu’un diagnostic technique relatif à l’état parasitaire d’une maison a été annexé à une promesse de vente ou à un acte de vente, le diagnostiqueur doit supporter les suites de ses erreurs de diagnostic.
Mots clefs : diagnostic technique – état parasitaire erroné – indemnisation – lien de causalité – responsabilité du diagnostiqueur – termites
Pour se repérer
M. et Mme X acquièrent une maison au vu des différents diagnostics obligatoires, dont un diagnostic technique lié à l’état parasitaire et faisant mention de « traces de termites et d’insectes xylophages sans activité ». Entreprenant des travaux de rénovation de leur bien, ils constatent qu’en réalité, il est infesté de termites et autres insectes xylophages, ce qui est confirmé par expertise. Ils introduisent alors en justice une action contre le diagnostiqueur ayant fourni un état des lieux erroné. Ils lui réclament le remboursement de tous les frais engagés pour réparer les dégâts causés par les insectes.
Par arrêt du 18 février 2015, la troisième chambre civile de la Cour de cassation renvoie le pourvoi devant une chambre mixte composée des première, deuxième, troisième chambres civiles et de la chambre commerciale, financière et économique.
Pour aller à l’essentiel
La Cour de cassation, réunie en chambre mixte, donne gain de cause aux acquéreurs dans son arrêt rendu le 8 juillet 2015 (n° 12-26.686). En effet, l’état parasitaire annexé à la vente garantit l’acquéreur contre le risque de présence de termites. N’ayant pas respecté ses obligations, le diagnostiqueur technique doit voir sa responsabilité engagée, dès lors qu’il est démontré que l’état parasitaire est erroné et que cela est source de préjudices pour les acquéreurs.
Pour aller plus loin
La loi impose que soient réalisés différents diagnostics avant toute vente immobilière pour éviter les mauvaises surprises que peuvent rencontrer des acquéreurs, lorsqu’ils entreprennent des travaux dans le bien dont ils viennent de se rendre propriétaires.
Ces différents diagnostics ont pour fonction d’alerter et d’informer le candidat acquéreur (mais aussi le locataire) sur certains aspects du bien qu’il projette d’acheter.
Ces différents contrôles doivent être effectués préventivement et ils sont annexés aux promesses de vente et actes de vente immobilière. Le législateur entend protéger l’acquéreur, rendu attentif par son notaire, et on notera que lorsque le vendeur s’abstient de fournir ces documents, il ne peut pas s’exonérer de la garantie des vices cachés, même si le contrat de vente contient une clause en sens contraire, y compris s’il ne s’agit pas d’un vendeur professionnel.
Pour la vente de son bien en l’espèce, le vendeur devait fournir un diagnostic de performance énergétique, un constat de risque d’exposition au plomb, un état d’amiante, l’état de l’installation intérieure de l’électricité, un état de l’installation intérieure du gaz et, point en débat, un état parasitaire relatif aux termites (s’y ajoute parfois un état des risques naturels et technologiques. En l’espèce, le vendeur avait mandaté les différents experts et avait bien rempli ses obligations (Code de la construction et de l’habitation, art. L. 271-4).
En revanche, c’est le diagnostiqueur technique qui commet une faute grave en ne s’acquittant pas scrupuleusement de la recherche des parasites dans la maison vendue.
Comme il a failli à ses obligations contractuelles, les acquéreurs ont dès lors pu agir contre lui et la Cour de cassation estime que sa responsabilité doit être engagée à juste titre. Il devait réaliser son diagnostic selon les normes légales et dans les règles de l’art. Rendant un état des lieux erroné, il n’a pas permis aux acquéreurs d’être informé de l’étendue des dégâts.
Le système étant prévu pour assurer la protection de l’acheteur immobilier et un lien de causalité ayant pu être établi entre les investigations insuffisantes du cabinet diagnostiqueur et l’infestation de la maison, le diagnostiqueur indélicat est dès lors condamné à prendre en charge les différents frais imprévus par M. et Mme X. et à leur payer le coût des travaux de réparation liés aux dégâts causés dans leur bien par les termites. En effet si le couple acheteur avait eu connaissance de ces nuisances en amont, il aurait négocié le prix de vente en tenant compte de ces coûts supplémentaires.
Le diagnostiqueur devra les indemniser à hauteur des coûts de réparation pour leurs différents préjudices matériels (au vu des sommes déterminées par expertise concernant les travaux de remplacement de pièces défectueuses suite à l’action des termites) mais devra leur verser également 1 500 euros au titre du préjudice de jouissance dans une bâtisse très ancienne et en mauvais état.
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Cour de cassation, Chambre mixte, 8 juillet 2015, n° 12-26.686
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est 14 boulevard Marie et Alexandre Oyon, 72030 Le Mans cedex 9,
contre l’arrêt rendu le 26 septembre 2013 par la cour d’appel de Montpellier (1re chambre, section AO1), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. Antoon X…,
2°/ à Mme Léonie Y… épouse X…,
domiciliés tous deux…, 34310 Quarante,
3°/ à la société Verdier et associés, société à responsabilité limitée, dont le siège est 16 rue Georges Durand, 34490 Murviel-lès-Béziers,
4°/ à M. Henri Z…, domicilié…, 34350 Valras-Plage,
défendeurs à la cassation ;
Par arrêt du 18 février 2015, la troisième chambre civile a renvoyé le pourvoi devant une chambre mixte. Le premier président a, par ordonnance du 22 juin 2015, indiqué que cette chambre mixte sera composée des première, deuxième, troisième chambres civiles et de la chambre commerciale, financière et économique ;
La demanderesse invoque, devant la chambre mixte, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;
Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société MMA IARD ;
Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme X… ;
La SCP de Nervo et Poupet s’est constituée pour la société Verdier et associés ;
La SCP Baraduc, Duhamel et Rameix s’est constituée pour M. Z… ;
Le rapport écrit de M. Guérin, conseiller, et l’avis écrit de M. Charpenel, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en chambre mixte, en l’audience publique du 29 juin 2015, où étaient présents : M. Louvel, premier président, M. Terrier, Mmes Flise, Batut, Mouillard, présidents, M. Guérin, conseiller rapporteur, Mmes Aldigé, Bignon, Riffault-Silk, MM. Mas, Grellier, Nivôse, Maunand, Mme Wallon, M. Pimoulle, Mmes Ladant, Darbois, conseillers, M. Charpenel, premier avocat général, Mme Marcadeux, directeur de greffe ;
Sur le rapport de M. Guérin, conseiller, assisté de Mme Konopka, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, de la SCP Piwnica et Molinié, l’avis de M. Charpenel, premier avocat général, auquel les parties, invitées à le faire, n’ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société MMA IARD (la société MMA) du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Verdier et associés et M. Z… ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 26 septembre 2013), que M. et Mme X…, qui ont acquis de M. Z… un bien immobilier à usage d’habitation, ont eu communication, avant la vente, des états parasitaires établis par la société Hérault diagnostic immobilier (la société HDI) ; qu’ayant découvert, à l’occasion de travaux, un état avancé d’infestation de termites, M. et Mme X… ont, après expertise judiciaire, assigné en indemnisation de leurs préjudices M. Z…, la société Verdier et associés, agence immobilière par l’entremise de laquelle ils avaient acquis le bien, et la société MMA, assureur de responsabilité de la société HDI, entre-temps mise en liquidation judiciaire ;
Attendu que la société MMA fait grief à l’arrêt de la condamner à payer diverses sommes à M. et Mme X… en réparation de leurs préjudices matériels et de jouissance alors, selon le moyen, que les conséquences d’un manquement à un devoir d’information et de conseil ne peuvent s’analyser qu’en une perte de chance dès lors que la décision qu’aurait prise le créancier de l’obligation d’information et les avantages qu’il aurait pu obtenir, s’il avait été mieux informé, ne sont pas établis de manière certaine ; qu’en relevant pour condamner la société MMA à payer à M. et Mme X… le montant de l’intégralité des travaux de reprise des dégâts causés par l’attaque des termites dont la présence n’avait été décelée que partiellement par l’assuré de la société MMA, que si M. et Mme X… « avaient connu l’ampleur des dégâts causés par l’infestation des insectes xylophages, ils auraient négocié la vente avec leur vendeur en tenant compte du coût des travaux de réparations desdits dégâts » bien que de tels motifs ne soient pas de nature à établir que, mieux informés, M. et Mme X…, qui avaient déjà connaissance de la présence de termites, même s’ils ignoraient l’ampleur exacte de leur attaque, auraient pu obtenir du vendeur une diminution du prix équivalente au coût des travaux de réparation, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu’il résulte de l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation que le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l’acte authentique de vente d’un immeuble garantit l’acquéreur contre le risque mentionné au 3° du deuxième alinéa du I de ce texte et que la responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art, et qu’il se révèle erroné ; qu’ayant relevé que les investigations insuffisantes de la société HDI n’avaient pas permis que les acquéreurs soient informés de l’état véritable d’infestation parasitaire de l’immeuble et retenu que ceux-ci avaient été contraints de réaliser des travaux pour y remédier, la cour d’appel a déduit exactement de ces seuls motifs que les préjudices matériels et de jouissance subis par M. et Mme X… du fait de ce diagnostic erroné avaient un caractère certain et que la société MMA, assureur de la société HDI, leur devait sa garantie ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société MMA aux dépens (…)
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société MMA à payer à M. et Mme X… la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
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