Colloque numéro 2 de l’AFDSD : LE DROIT DE LA SECURITE ET DE LA DEFENSE EN 2014
Atelier 1 : Organisation générale et institutions de la sécurité et de la défense.
Les ministres chargés de la sécurité et de la défense sous la 5° République par Olivier GOHIN
Si on observe le champ des institutions ministérielles ; le coup vient de loin et surtout pour ce qui est de l’actuel Ministre de la Défense, en effet sous l’Ancien Régime, il y avait déjà le secrétaire d’Etat de la guerre et le secrétaire d’Etat à la marine.
Dans le domaine de la sécurité, on avait sous l’Ancien Régime le Département de la Maison du Roi.
Cependant c’est en 1790 que fut créé le ministère de l’Intérieur, même si déjà à la fin de l’Ancien Régime le Secrétaire d’Etat a pu être nommé Chef de Département de l’Intérieur.
Mr Olivier Gohin, après son bref rappel historique, a mis en avant le rapprochement de ces deux institutions en prenant soin d’exclure les secrétaires d’Etat et les ministres qui ne sont pas concernés.
Pour observer la comparaison des institutions, voici le tableau afin d’étayer ses propos.
Prés. |
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GAU
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POM
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VGE
|
MIT
|
CHI
|
SAR
|
HOL
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Total |
Mandat (dont coh.) en années |
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11 |
5 |
7 |
14 (2+2) |
12 (5) |
5 |
2, 5 |
56, 5 (9) |
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Min. sécu. |
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Nombre |
Min. maj |
4, 5 (*) |
1, 5 (*) |
2 |
6 |
5 |
3 |
2 |
24 |
Nombre |
Min. coh |
x |
x |
x |
1 |
4
|
x |
x |
5 |
Nombre |
gén. |
4, 5 |
1, 5 |
2 |
7 |
9 |
2 |
2 |
29 |
Durée moyenne en années |
Min. sécu |
2, 4 |
3, 3 |
3, 5 |
2 |
1, 3 |
1, 6 |
1, 3 |
1, 9 |
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Min. déf. |
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Nombre |
Min. maj. |
2 |
2 |
4 |
6 |
2 |
3 |
1 |
20 |
Nombre |
Min. coh. |
x |
x |
x |
1 |
1 |
x |
x |
2 |
Nombre |
gén. |
2 |
2 |
4 |
7 |
3 |
3 |
1 |
22 |
Durée moyenne en années |
Min. déf. |
5, 5 |
2, 5 |
1, 8 |
2 |
4 |
1, 7 |
2, 5 |
2, 6 |
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Gén. |
|
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|
|
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|
Nombre |
|
6, 5 |
3, 5 |
6 |
14 |
12 |
6 |
3 |
51 |
Durée moyenne en années |
|
1, 7 |
1, 4 |
1, 2 |
1 |
1 |
0, 8 |
0,8 |
1, 1 |
(*) le ministère de Raymond Marcellin, de mai 1968 à février 1914, s’étend sur le fin du mandat du général de Gaulle et la plus grande partie du mandat du président Pompidou : par convention, il est décompté 0, 5 pour chacun d’entre eux.
Ce tableau, relatif à la consommation ministérielle, établit un rapport entre la durée des mandats des Présidents de la République et le nombre des Ministres de la Sécurité et des Ministres de la Défense.
La consommation est variable d’un Président à l’autre et va en s’accélérant. On peut constater que la consommation ministérielle est plus forte en période de cohabitation, par exemple sous Chirac il y a eu neuf ministres chargés de la sécurité et douze ministres chargés de la défense ce qui est considérable.
De plus la consommation ministérielle est plus importante en sécurité qu’elle ne l’est en défense.
Mr GOHIN a ensuite abordé les ressemblances institutionnelles, et pour cela en a énumérées cinq.
– D’abord si on confronte les Gouvernements et les ministres on se rend compte que l’on a une relative stabilité gouvernementale, avec en moyenne un Gouvernement tous les dix-huit mois mais au contraire une véritable instabilité ministérielle surtout en ce qui concerne les ministres chargés de la sécurité.
En effet il y a eu vingt-neuf ministres chargés de la sécurité et vingt-deux ministres chargés de la défense sous la cinquième République.
-La durée moyenne de fonction des Ministre tant pour la Sécurité que pour la Défense est relativement brève, en effet peu de Ministres ont eu des fonctions durables.
-Excepté le cas de Raymond Marcellin chaque mandat présidentiel commence par un nouveau ministre chargé de la sécurité et un nouveau ministre chargé de la défense.
-La cohabitation a pour conséquence un changement de Gouvernement et de ministres aussi bien pour la Sécurité que pour la Défense. En effet pour les quatorze ans de mandat de François Mitterrand on a eu quatre années de cohabitation avec au total pour toutes ses années de mandats ; quatorze ministres chargés de la sécurité et de la défense, quant aux douze années de mandats de Jacques Chirac on a eu cinq années de cohabitation et au total douze ministres de la sécurité et de la défense.
-Les Ministres chargés de la sécurité et de la défense sont des hommes politiques qui sont proches du Premier Ministre ou du Président de la République. En effet on constate souvent une réelle proximité, ce fut le cas par exemple entre De Gaulle et Pierre Messmer ou Valéry Giscard d’Estaing et Michel Poniatowski.
Cependant il faut préciser qu’il subsiste parfois des exceptions, car parfois il est fait appel à des techniciens pour la défense tel fut le cas par exemple de Pierre Guillaumat sous De Gaulle ou bien d’André Giraud sous Mitterrand.
Suite à cela, Mr GOHIN a exposé les différences institutionnelles.
Tous les Ministres de l’intérieur n’ont pas seuls en charge la sécurité, par exemple Charles Pasqua avait comme bras droit Robert Pandraud Ministre délégué à la Sécurité.
De plus certains ministres dans le domaine de la sécurité ont pu avoir des dénominations plus larges que ministre de l’Intérieur comme Paul Quilès Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique. En 1969, est aussi créé un Ministre chargé de la défense nationale qui sera Michel Debré.
La défense nationale étant de la responsabilité du Premier Ministre, le Ministre chargé de la défense nationale déborde parfois dans le champ du Premier Ministre.
La fonction de Ministre de l’Intérieur a été très fréquemment un tremplin pour accéder à des fonctions plus importantes au sein de l’exécutif, en effet Jacques Chirac, Dominique De Villepin, Manuel Valls sont devenus par la suite Premier Ministre et Nicolas Sarkozy est devenu Président de la République. Pour les ministres chargés de la défense, les parcours sont eux moins performants.
Il y a une dualité des fonctions, en effet comme tout ministre, le Ministre de l’Intérieur et le Ministre de la Défense sont à la charnière du politique et de l’administratif.
D’abord du politique, car il faut une vision pour orienter l’action de l’administration. En matière de politique, il y a une situation de subordination notamment au Président de la République en fait majoritaire pour la sécurité et la défense et cela aussi en période de cohabitation.
Cependant en période de cohabitation c’est compliqué, en effet on peut constater que la matière de sécurité est bien entre les mains du Premier Ministre et dans ce cas le Président de la République est hors-jeu.
Cette action politique se développe au sein du Conseil des Ministres où le Ministre de l’Intérieur et le Ministre de la Défense se rencontrent.
En effet, le Ministre chargé de la Sécurité a une activité principale et le Ministre chargé de la défense doit l’appuyer dans sa mission notamment en matière de sécurité civile où les armées viennent en appui de la police ou de la gendarmerie nationale.
Le ministre est aussi un chef d’administration ; il y a un secrétaire général du ministère qui assiste le ministre et un chef de cabinet. Il peut y avoir une interaction entre les administrations qui peut s’opérer.
Voici un tableau récapitulatif des services actifs dont les deux ministres disposent pour la sécurité nationale.
Ministre de l’Intérieur |
Ministre de la Défense |
– Direction générale de la Police nationale (DGPN)
dont
. Direction centrale de la Sécurité publique (DCSP)
. Direction centrale de la Police aux frontières (DCPAF)
. Direction centrale des Compagnies républicaines de sécurité (DCCRS)
– Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI)
– Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN)
– Direction générale de la Sécurité civile de la Gestion des risques (DGSCGC)
|
– Etat-major des Armées qui a autorité sur les institutions ou services interarmées dont la Direction du renseignement militaire ou les OGZDN et sur chacune des trois armées :
. Etat-major de l’Armée de terre
. Etat-major de la Marine
. Etat-major de l’Armée de l’air
– Direction générale de la Sécurité extérieure
– Direction de la Protection et de la Sécurité de la défense |
La loi du 3 août 2009 finalise le processus initié depuis le décret du 15 mai 2002, et a conduit à donner un budget au Ministre de l’Intérieur et prévoit désormais le « rattachement organique et opérationnel » de la gendarmerie au sein du ministère de l’Intérieur.
Cependant une séparation subsiste entre l’organique et le fonctionnel, nous pourrions alors nous interroger sur l’évolution du ministère de l’Intérieur qui a deux pôles ; un de sécurité et un pôle d’administration.
Le pôle de sécurité ne devrait-il pas seulement être un pôle de politique intérieure, mais un pôle qui devrait être de sécurité nationale avec un ministre de la sécurité nationale intérieur ou extérieur ?
En effet un djihadiste de l’extérieur peut faire exploser une bombe à l’intérieur !
Il y a donc une réflexion à mener sur l’organique pour que l’organique soit en correspondance avec le fonctionnel.